Auteurs et auteures
Participent à la 24ème édition du
Festival International de Littérature
de Loèche-les-Bains:
Mariam Al-Saedi, Emirats Arabes Unis
Nora Amin, Egypte
Aleida Assmann, Allemagne
Jan Assmann, Allemagne
María Cecilia Barbetta, Argentine/Allemagne
Priya Basil, Grande-Bretagne
Petr Borkovec, Czechia
Christos Chryssopoulos, Grèce
Zoltán Danyi, Hongrie/Serbie
Elisa Shua Dusapin, Suisse
Theresia Enzensberger, Allemagne
Karl-Markus Gauss, Autriche
Claire Genoux, Suisse
Lavinia Greenlaw, Grande-Bretagne
Durs Grünbein, Allemagne
Rolf Hermann, Suisse
Federico Italiano, Italie
Pedro Lenz, Suisse
Frances Leviston, Grande-Bretagne
Johanna Lier, Suisse
Tanja Maljartschuk, Ukraine/Autriche
Petros Markaris, Grèce
Francesca Melandri, Italie
Fernanda Melchor, Mexique
Eman Mohammed Turki, Emirats Arabes Unis
Gianna Molinari, Suisse
Terézia Mora, Allemagne
Adolf Muschg, Suisse
Madame Nielsen, Danemark
Alan Pauls, Argentine
Antoinette Rychner, Suisse
Géraldine Schwarz, Allemagne/France
Vladimir Sorokin, Russie
Ré Soupault, Allemagne
Aleš Šteger, Slovénie
Maria Stepanova, Russie
Christian Uetz, Suisse
Aglaja Veteranyi, Suisse
Jan Wagner, Allemagne
Nell Zink, États-Unis d'Amérique
Traductrices et traducteurs
Angelica Ammar
Marta Eich
Franco Filice
Carla Imbrogno
Andreas Jandl
Gulnoz Nabieva
Anne Posten
Shiri Shapira
Mariam Al-Saedi
Marim Al-Saedi, née en 1974 à Al Ain, a étudié la littérature anglaise et a poursuivi ses études en planification urbaine à l’Université américaine de Sharjah, et en Jerusalem Studies à l’Université d’Aberdeen en Écosse. Elle vit à Abu Dhabi et travaille pour le Ministère des transports.
Les histoires de Mariam Al-Saedi rappellent celles de Peter Bichsel : elle met en avant la vie des petites gens, et raconte destins personnels et recherche de liberté individuelle. Ses personnages se meuvent dans une société oscillant entre tradition et innovation. Elle-même dit qu’à travers l’écriture, elle cherche à atteindre une meilleure compréhension du concept de « vie ».
L’un de ses récits est paru dans l’anthologie In a Fertile Desert. Modern Writing from the United Arab Emirates (Arabia, 2009), et plusieurs autres ont été réunies dans le volume Mariam und das Glück (« Mariam et le bonheur », Lisan, 2009).
À Loèche-les-Bains, Mariam Al-Saedi et Eman Mohammed Turki liront des nouvelles traductions de leurs textes et témoigneront ensemble lors d’une table ronde avec Nora Amin de la condition d’autrice dans les pays arabes.
Nora Amin
Nora Amin est une autrice, performeuse et metteuse en scène née en 1974 au Caire. Son travail se situe à la croisée de la littérature, du théâtre, de la danse et du féminisme. En tant qu’artiste, elle s’engage dans l’activisme sociopolitique et se rebelle contre les traditions du patriarcat, de l’autorité, du sexisme et du racisme. Depuis les années 2000, elle explore donc de nouvelles façons de faire du théâtre, au-delà des pièces étatiques et commerciales. Ses romans, nouvelles, essais et poèmes mêlent engagement politique et recherche d’une nouvelle forme d’expression littéraire, sans jamais craindre la provocation. Elle a été professeure invitée de la Samuel Fischer Gastprofessur à la Freie Universität de Berlin, où elle vit actuellement.
Dans tous ses travaux, Nora Amin fait preuve d’une perspective féminine qui lui est propre. Dans le livre Weiblichkeit im Aufbruch (« Irruption de féminité »), elle analyse, en partant de ses propres expériences, le rôle du corps féminin dans l’espace public en s’appuyant sur les évènements de la Place Tahrir. Dans ce brûlant essai politique, elle se base sur ses observations concernant la place de la femme dans les sociétés arabes pour réfléchir aux concepts de sphère privée, d’intimité et de corporalité. Ce texte original et intense est traversé de récits étonnants, parfois effrayants, qui renvoient tant à des évènements traumatiques qu’à des souvenirs d’enfance, sans oublier son expérience de femme dans la société occidentale.
Série de conversation « perspectives »
Weiblichkeit im Aufbruch (« Irruption de féminité »). Traduit de l’anglais par Max Henninger. Matthes & Seitz 2018
Aleida Assmann
Aleida Assmann, originaire d’Allemagne, est angliciste, égyptologue et spécialiste de littérature et de culture. Elle a publié de nombreux travaux portant sur la littérature anglaise et l’archéologie de la communication littéraire. Depuis les années 90, elle concentre ses recherches sur l’anthropologie de la culture, et plus particulièrement sur la mémoire culturelle, le souvenir et l’oubli. Elle a obtenu avec son mari Jan Assmann le prix de la paix 2018 du Deutsches Buchhandel.
Aleida Assmann observe avec beaucoup d’attention la façon dont le passé se reflète dans le présent. Ses travaux tournent autour de la question de la signification du souvenir et de l’héritage culturel dans notre perception culturelle du présent. En se servant d’une analogie avec le « rêve américain », Aleida Assmann développe dans son livre Der europäische Traum (« Le Rêve européen ») trois leçons que les Européens auraient tiré de l’histoire. Elles constituent les fondements du projet Europe. Ce projet a-t-il encore un avenir ? Cela dépend notamment de si ces leçons continuent d’être reconnues comme lignes directrices et appliquées comme telles. « Il faut que notre souvenir soit dialogique » affirme Aleida Assmann. « Qu’advient-il quand les populations, confrontées à des vagues migratoires de plus en plus puissantes, se mélangent, ou quand des nouveaux souvenirs s’ajoutent à ceux qui prennent racine au même endroit ? »
Dans son livre Menschenrechte und Menschenpflichten (« Les droits et les devoirs de l’homme »), Aleida Assmann plaide en faveur d’un nouveau contrat social qui prendrait en compte non seulement les droits de l’homme, mais aussi des valeurs comme l’empathie et la solidarité.
Série de conversation « perspectives »
Der europäische Traum. Vier Lehren aus der Geschichte (« Le Rêve européen. Quatres leçons d’histoire »). Beck 2018
Menschenrechte und Menschenpflichten. Schlüsselbegriffe für eine humane Gesellschaft (« Les droits et les devoirs de l’homme. Concepts clés pour une société humaine »). Picus Verlag 2018
Formen des Vergessens (« Formes de l’oubli », collection Historische Geisteswissenschaften. Frankfurter Vorträge. Volume 9. Sous la direction de Bernhard Jussen et Susanne Scholz). Wallstein 2016
Jan Assmann
Jan Assmann, professeur en Égyptologie, a enseigné à Heidelberg durant de longues années. Son œuvre aussi vaste qu’importante a initié plusieurs débats culturels et religieux actuels. Avec sa femme Aleida Assmann, il a fondé une théorie de la mémoire culturelle inspirée du concept de mémoire collective développé par le sociologue et psychologue français Maurice Halbwachs. Le couple Assmann a reçu en 2018 le Prix de la paix du Deutscher Buchhandel.
Son dernier livre Achsenzeit (« La période axiale ») se base sur une thèse de Karl Jasper : à un certain point de l’histoire, diverses cultures auraient produit en même temps des représentations philosophiques et religieuses de « l’humanité » et de la « transcendance » qui nous influencent encore aujourd’hui. Cette vision de l’histoire a l’avantage d’abandonner tout eurocentrisme, sans pour autant renoncer aux « valeurs européennes ».
Jan Assmann esquisse avec brio le panorama scientifique et historique du théorème de la période axiale et démontre la nécessité de comprendre le présent à partir de l’histoire. Le souvenir nourrit le présent.
Le futur réclame une origine, comme disait feu le philosophe Odo Marquard. Un tel souvenir ne se produit pas lui-même, mais doit constamment être en cours de fabrication. Voilà l’un des nombreux constats de ce livre, dont la pertinence marque littéralement son époque.
Série de conversation « perspectives »
Achsenzeit. Eine Theorie der Moderne (« La période axiale. Une théorie de la modernité »). C.H.Beck Verlag 2018
Totale Religion. Ursprünge und Formen puritanischer Verschärfung (« Religion totale. Origines et formes du durcissement puritain »). Picus 2016
Exodus. Die Revolution der Alten Welt (« Exode. La révolution de l’Ancien Monde »). Beck 2015
Religion und kulturelles Gedächtnis (« Religion et mémoire culturelle »). Beck 2000
Das kulturelle Gedächtnis. Schrift, Erinnerung und politische Identität in frühen Hochkulturen (« La mémoire culturelle. Écriture, souvenir et identité politique au sein des première cultures»). Beck 1992
María Cecilia Barbetta
María Cecilia Barbetta est née en 1972 à Buenos Aires, en Argentine. Elle y a fréquenté l’école allemande et a fait des études d’allemand langue étrangère. En 1996, elle vient vivre à Berlin grâce à une bourse du DAAD, et n’en est plus jamais repartie. Elle vit de sa plume depuis 2005. Elle écrit ses romans en allemand.
Son dernier roman, Nachtleuchten, (« Lumières dans la nuit »), semble lui avoir demandé beaucoup de travail, puisqu’il paraît plus de dix ans après son premier, l’acclamé Änderungsschneiderei Los Milagros, (« Service de retouches Los Milagros »). Cette fois encore, Barbetta retrouve l’univers de sa ville d’origine, plus exactement de la banlieue de Ballester, où elle-même a grandi. L’histoire se joue entre une école catholique, l’atelier d’un garagiste, une boulangerie, une laverie et un salon de coiffure.
L’atmosphère est celle, spectrale, d’un jour précédant un coup d’État. Barbetta replonge dans ses souvenirs d’enfance, au temps de la dictature militaire, quand la peur des adultes était omniprésente – au point de devenir un schéma émotionnel prédominant pour toute sa génération.
Le roman de Barbetta saisit par sa mise en valeur de la peur, par son humour ainsi que par sa langue colorée et pleine d’esprit, qui se fait sentir jusque dans la typographie. C’est un mélange irrésistible d’intelligence, d’humour, de rythme et d’originalité, une œuvre qui semble d’abord ludique et légère, mais qui finit par révéler toute sa complexité.
Nachtleuchten (« Lumières dans la nuit »). Roman. S.Fischer Verlag 2018
Änderungsschneiderei Los Milagros (« Service de retouches Los Milagros »). Roman. S. Fischer Verlag 2010
Priya Basil
Priya Basil, née en 1977 à Londres, est une autrice anglaise originaire d’Inde. Elle a grandi au Kenya, étudié en Angleterre et vit aujourd’hui à Berlin. Elle a publié des romans, un récit ainsi que de nombreux essais pour divers journaux. Elle est active dans plusieurs groupes qui s’engagent en faveur de la paix et du contrôle des armes.
Les thèmes récurrents de ses écrits de non-fiction sont l’identité, l’art, la surveillance des masses, la démocratie, le (néo)colonialisme et l’Union Européenne.
Son dernier livre est un texte hybride composé d’essais et de fragments autobiographiques. Dans Gastfreundschaft (« Hospitalité »), nous sommes toutes et tous cordialement invité·e·s par Priya Basil : voilà une perspective réjouissante, qui présage d’une soirée stimulante, mêlant bonne chair et conversations passionnantes. Mais ce geste, qu’on qualifie d’hospitalité, recouvre en réalité bien plus que cela : il s’agit de prendre et donner de façon équilibrée, de s’adresser aux proches comme aux étrangers, sans oublier que ce geste varie en fonction des cultures.
Dans son livre, Priya Basil raconte les traditions indo-kenyanes de sa famille, une invitation surprise à déguster des asperges et un repas géant dans un temple Sikh à Berlin. Elle plaide avec ardeur pour une Europe hospitalière, tout en nous invitant elle-même à la rejoindre à table. Car c’est bien connu, c’est autour d’assiettes bien remplies que les meilleures conversations s’animent, ouvrant la voie à toute une variété de débats, au sujet de Dieu ou de la Terre, de la politique ou de la culture, ou encore de l’inconditionnalité de l’hospitalité.
Gastfreundschaft (« Hospitalité »). Traduit de l’anglais par Beatrice Fassbender. Insel Verlag 2019
Priya Basil et Chika Unigwe: Erzählte Wirklichkeiten: Tübinger Poetikdozentur 2014 (« Réalités racontées : leçons poétiques de Tübingen »). Swiridoff 2015
Die Logik des Herzens (« La Logique du cœur », orig.: The Obscure Logic of the Heart.) Traduit de l’anglais par Barbara Christ. Schöffling 2012
Publié en anglais : Strangers on the 16:02. Black Swan Books 2011
Petr Borkovec
Petr Borkovec, né en 1970, est poète, écrivain, traducteur et dramaturge au café littéraire Fra, à Prague. Il est le seul auteur de sa génération à qui la critique reconnaisse unanimement d’une part une grande adresse dans le maniement des ressources lyriques traditionnelles, et d’autre part une voix marquante, qui dans son individualité réussit à rendre hommage à la meilleure poésie du XXème siècle. Comme le disait déjà Die Zeit en 2002 : « un jeune poète tchèque à la perfection discrète ».
D’une voix douce et laconique, Borkovec documente avec ses poèmes la mutation des banlieues pragoises. Comme le dit la poète Ilma Rakusa, il parvient à figer des instants du quotidien sans jamais rien enlever de leur précarité ; par ce geste, il ensorcèle les choses matérielles. En plus de raconter les objets du quotidiens et les espaces de l’intime, Borkovec scrute également l’intérieur de l’Europe moderne : il révèle notre monde comme l’empire de l’entre-deux, en voie d’effondrement, laqué par une langue poétique volontaire.
Petr Borkovec a occupé en tant que professeur invité la cinquième chaire de poétique à Dresde, qu’il a consacrée à la « littérature d’Europe centrale », et il a bénéficié en 2004-2005 d’une bourse du programme artistique du DAAD. Il a notamment traduit des poèmes de Vladimir Nabokov, Joseph Brodsky et Jewgenij Rejn, ainsi que des pièces de Sophocle et d’Eschyle.
En collaboration avec la Deutsche Akademie für Sprache und Dichtung pour le projet « L’Europe en poème – Grand tour » (« Europa im Gedicht – Grand Tour »).
Liebesgedichte (« Poèmes d’amour »). Traduit du tchèque par Christa Rothmaier. Edition Korrespondenzen 2014
Amselfassade (« Façade de merle »). Prose et poèmes. Traduit du tchèque par Christa Rothmaier. Friedenauer Presse 2006
Nadelbuch (« Le livre de l’aiguille »). Poèmes en tchèque et en allemand. Traduit du tchèque par Christa Rothmaier. Edition Korrespondenzen 2004
Christos Chryssopoulos
Christos Chryssopoulos, né en 1968 à Athènes, a étudié l’économie et la psychologie et travaille aujourd’hui comme écrivain, traducteur et photographe. Il est membre du Parlement européen de la culture et écrit régulièrement pour la presse nationale et internationale. Ses livres ont été traduits dans le monde entier. Parthenon est son premier livre publié en allemand.
Dans Parthenon, Christos Chryssopoulos aborde les représentations collectives et la politique en construisant son intrigue autour d’un acte terroriste : dans le but de se libérer soi-même et le peuple grec du poids accablant de leur héritage antique, un jeune homme fait sauter le Parthénon. Chryssopoulos parle dans son roman d’histoire, d’art et de la tension qui oppose le concept d’Europe comme unité autonome à l’identité nationale grecque.
Par son écriture subtile, il questionne l’ambivalence non seulement des Grecs, mais également de toute identité nationale. Un roman courageux, à la langue puissante, qui porte sur la construction d’une nation, la poésie de la destruction et qui renvoie une image forte de la littérature contemporaine grecque. Dans les mots de Robert Menasse : « Une importante voix venue de Grèce, et un grand conteur. Si vous voulez comprendre l’Europe et pouvoir la considérer comme lieu d’origine, lisez de la littérature européenne. Christos Chryssopoulos est un auteur de cette envergure-là. Voilà ce que peut la littérature : raconter des hommes, de sorte à nous faire comprendre : c’est ainsi que nous sommes. Non pas nous les Grecs, mais nous les hommes. »
Parthenon. Roman. Traduit du grec par Theo Votsos. Haymon Verlag 2018
Zoltán Danyi
Zoltán Danyi est né en 1972 au sein de la minorité hongroise de Senta, en ex-Yougoslavie, où il vit encore aujourd’hui. L’éclatement de la Yougoslavie est un traumatisme qui a particulièrement impacté sa génération. Il avait vingt ans au moment des faits et aurait été en âge de servir dans les troupes militaires, mais il a échappé à l’appel aux armes en partant étudier la philosophie et la littérature à Szeged, en Hongrie. Les évènements de son pays d’origine ne l’en ont pas moins profondément affecté.
En tant que Serbo-hongrois, on lui a souvent demandé pour qui ou en faveur de quoi il était. Cette position a eu l’avantage de le préserver de la folie nationaliste et a fait de lui un observateur attentif.
Son premier roman, Der Kadaverräumer (« Le Ramasseur de cadavres »), porte sur les conséquences de la violence subie par un homme et sur le processus de destruction qui s’enclenche en conséquence. Dans son roman, Danyi affirme que l’agression nationaliste, la violence des armes et la folie meurtrière seraient l’équivalent d’une agression sexuelle non accomplie. C’est pourquoi son roman ne parle pas d’idéologies, mais bien de corps et de rapport physique.
« Le traumatisme, c’est l’impossibilité de la narration », dit Aleida Assmann dans sa thèse d’habilitation Erinnerungsräume (« Espaces du souvenir »). L’expérience traumatique, écrit Assmann, fait éclater l’ordre chronologique, se refuse au travail d’interprétation, et ainsi à la verbalisation. Dès lors, comment raconter un traumatisme de guerre ? Dans son premier roman, poétique et exigeant, Zoltán Danyi accompagne un homme sans nom dans l’exploration de son propre esprit.
Zoltán Danyi et Terézia Mora ont été nominés avec Der Kadaverräumer pour le Prix international de la Haus der Kulturen der Welt.
Der Kadaverräumer (« Le Ramasseur de cadavres »). Roman. Traduit du hongrois par Terézia Mora. Suhrkamp 2019
Elisa Shua Dusapin
Elisa Shua Dusapin est née en 1993 dans le Sud-ouest de la France d’une mère coréenne et d’un père français. Elle est en Suisse depuis l’âge de cinq ans. Elle a travaillé comme assistante de théâtre et comédienne, et elle a étudié à l’Institut littéraire de Bienne. Elle vit dans le Jura.
Son roman Hiver à Sokcho se déroule dans une petite ville balnéaire et portuaire de la côte ouest de la Corée du Sud, à la frontière de la Corée du Nord, pendant la période de creux. Pour gagner un peu d’argent, une étudiante coréenne travaille comme bonne dans un petit hôtel, où elle rencontre un illustrateur français venu chercher de l’inspiration pour une bande-dessinée. Tout en douceur et en discrétion, en se limitant à l’essentiel, Elisa Shua Dusapin décrit la rencontre de deux personnages que tout oppose : deux égarés en attente d’un nouveau départ, et qui chacun à sa façon s’apprêtent à le tenter. Un roman brillant et parsemé de jeux de réflexion sur un extérieur réfractaire et un intérieur difficile à atteindre.
À Loèche-les-Bains, Elisa Shua Dusapin présentera Hiver à Sokcho avec son traducteur Andreas Jandl.
En collaboration avec le CTL.
Ein Winter in Sokcho (Hiver à Sokcho) Traduit du français par Andreas Jandl. Blumenbar 2018
Les Billes du Pachinko. Roman. Editions Zoé 2018
Hiver à Sokcho. Roman. Editions Zoé 2016
Theresia Enzensberger
Theresia Enzensberger, née en 1986, a grandi à Munich, a étudié le cinéma et l’histoire du cinéma à New York, et vit aujourd’hui de son activité de journaliste, essayiste et chroniqueuse pour différents grands journaux allemands. Elle habite à Berlin.
Son premier roman Blaupause (« Pause bleue ») raconte l’histoire d’une jeune étudiante du Bauhaus dans les sémillantes années 1920. Luise Schilling est jeune, a soif de connaissances et un brillant avenir l’attend. Elle étudie auprès de professeurs comme Gropius ou Kandinsky et se jette à corps perdu dans les rêves et idéaux de son époque. Entre art et technique, avant-garde et communisme, populisme et révoltes étudiantes, Luise se familiarise très vite avec les utopies sociales qui continuent de nous influencer jusqu’à aujourd’hui. Theresia Enzensberger raconte avec immédiateté et dans une langue très actuelle l’histoire d’une jeune femme prise dans le tourbillon de la vie, abordant ainsi le thème de la conflictualité et des luttes généralement vaines contre les structures patriarcales.
Son roman est un appel au présent. Il exhorte les lecteurs à identifier non seulement les dangers extérieurs qui menaceraient l’équilibre d’une société démocratique, mais aussi les contradictions de son centre. Ce constat peut paraître évident, mais il n’a jamais été aussi nécessaire.
Pour le critique Richard Kämmerling, Blaupause de Theresia Enzenberger est un mélange réussi entre « campus novel historique » et « roman artistique féminin ».
Série de conversation « perspectives »
Blaupause (« Pause bleue »). Roman. Carl Hanser Verlag 2017
Karl-Markus Gauss
Karl-Markus Gauß est né en 1954 à Salzbourg, où il vit et travaille aujourd’hui comme auteur et éditeur de la revue Literatur und Kritik.
Nombreux sont ceux qui recherchent l’aventure dans le lointain. Dans son dernier livre, Abenteuerliche Reise durch mein Zimmer (« Périple à travers ma chambre »), Karl-Markus Gauß, cartographe des marges européennes, la trouve à proximité de lui. Il part pour un voyage qu’il pourrait effectuer sans même quitter son lit, mais qui nous fera parcourir toute une variété d’époques et de lieux. Qu’il écrive au sujet de ses draps, du livre de recettes de sa grand-mère, d’une vieille valise qui a traversé l’Atlantique ou du coupe-papier de Hans Hatschek, un industriel morave, c’est toujours dans ces objets du quotidien qu’il entrevoit la richesse et la diversité du monde. Nous partons ainsi à la découverte d’individus étranges et courageux, de régions éloignées, de nationalités inconnues et surtout de l’auteur lui-même. Karl-Markus Gauß nous entraîne à sa suite dans une expédition divertissante et édifiante qui explore le terrain inconnu du domaine de l’intime.
C’est ainsi que se présente le pays que l’on s’apprête à sillonner. Le terrain est balisé, sans pour autant que cela crée de frontières. Ce que Karl-Markus Gauß entreprend dans son fascinant dernier ouvrage, c’est ce que le spécialiste de la culture Bernd Stiegler appelait « reisender Stillstand » (« arrêt en mouvement ») : campé en un seul endroit, c’est pourtant le monde entier qu’il explore.
Abenteuerliche Reise durch mein Zimmer (« Périple à travers ma chambre »). Paul Zsolnay Verlag, Wien 2019
Zwanzig Lewa oder tot. Vier Reisen (« Vingt lewa ou la mort. Quatre voyages »). Paul Zsolnay Verlag, Wien 2017
Der Alltag der Welt. Zwei Jahre, und viele mehr (« Le quotidien du monde. Deux ans et bien plus encore »). Paul Zsolnay Verlag, Wien 2015
Lob der Sprache, Glück des Schreibens (« Louange de la langue, bonheur de l’écriture »). Otto Müller Verlag, Salzburg 2014
Claire Genoux
Claire Genoux, née en 1971, a publié plusieurs romans et recueils de poèmes, parmi lesquels Saisons du corps (1999), pour lequel elle a reçu le Prix de poésie C.-F. Ramuz. Après des études d’art, elle a enseigné le français langue étrangère et a travaillé pour différentes publications en Suisse et à l’étranger. Elle est aujourd’hui écrivaine et enseignante à l’Institut littéraire suisse de Bienne.
Avec sa prose, Claire Genoux rend hommage à des autrices valaisannes comme S. Corinna Bille ou Catherine Colomb, et ouvre tout comme elles des questionnements existentiels. Dans son dernier recueil de poèmes, Orpheline (2016), elle revient sur le décès de sa mère. Dans Le Matin Dimanche, Denis Maillefer écrit : « Claire Genoux cherche le sel qui est dans les larmes, et elle organise ensuite les grains sur la feuille, patiemment. À la fin cela forme une trace, c’est le poème [...]. »
Dans le roman Lynx, sa dernière publication, Claire Genoux livre « une méditation sur l’écriture, l’enfance et le pouvoir des mots » (Anne Pitteloud pour Le Courrier).
Il n’existe pas encore de traduction d’une œuvre de Claire Genoux. Plusieurs de ses poèmes ont été traduits ça et là pour des anthologies ou des revues, notamment dans le volume « Grand Tour – Un voyage à travers la jeune poésie européenne » (Grand Tour – Eine Reise durch die junge Lyrik Europas).
En collaboration avec la Deutsche Akademie für Sprache und Dichtung pour le projet « L’Europe en poème – Grand tour » (« Europa im Gedicht – Grand Tour »).
Lynx. Roman. Éditions Corti 2018
Orpheline. Poèmes. Bernard Campiche Éditeur 2016
La Barrière des peaux. Roman. Bernard Campiche Éditeur 2014
Lavinia Greenlaw
Lavinia Greenlaw, artiste aux multiples facettes, est née en 1962 à Londres, où elle vit encore aujourd’hui. Elle enseigne l’écriture créative dans différentes universités d’Angleterre, d’Allemagne et des États-Unis et travaille également pour la radio et la télévision. Lavinia Greenlaw, lauréate du Prix Spycher 2002, écrit des poèmes, des romans, des libretti, des pièces radiophoniques, des essais, des nouvelles, des pièces sonores et des scénarios.
Les recueils de Greenlaw, jamais très épais, paraissent à de longs intervalles, toutes les quelques années, comme si leur concentré de mots exigeait ce long processus de maturation. Dans ses poèmes, elle allie sans peine des éléments qui dans la poésie contemporaine vont rarement de pair : urgence existentielle et élégance littéraire, jeux de mots et profondeur thématique… Elle fait ainsi preuve de modernité sans pour autant renoncer à la lisibilité.
Après des années de production littéraire abondante, l’artiste tisse dans Eine Theorie unendlicher Nähe (« Une théorie de la proximité infinie ») un texte empreint de délicatesse qui démontre une fois de plus l’excellence de son écriture. Ces poèmes rappellent le calme méditatif des vers de Robert Creeley, ou la musique de John Cage. À la lecture, on se fond dans le corps de l’énonciatrice, qui arpente les images. Avec elle, on observe des champs obscurs à travers un télescope, on se jette dans des peintures, et on expérimente, le temps d’un instant, la noblesse d’une simple présence : « als wäre der Körper, nun rahmenlos, Raum, / der sich in Raum entfaltet, Feld an Feld » (« comme si le corps était, maintenant sans cadre, un espace, / qui se développe dans l’espace, champ contrechamp »).
Eine Theorie unendlicher Nähe (« Une théorie de la proximité infinie »). Poèmes. Traduit de l’anglais par Wiebke Meier. Édition bilingue. Edition Lyrik Kabinett bei Hanser 2018.
Minsk. Traduit de l’anglais par Raphael Urweider. DuMont 2006.
Durs Grünbein
Durs Grünbein est né en 1962 à Dresde. En 1985, il déménage à Berlin-Est, où il entame des études de théâtre. Il se réoriente rapidement vers l’écriture. Il étudie en autodidacte la physique quantique, la neurologie, la philosophie de Ludwig Wittgenstein, l’École de Francfort et les structuralistes français. Grünbein travaille aujourd’hui comme poète, traducteur et essayiste à Berlin et à Rome.
Comme s’il s’agissait d’un évènement de l’histoire mondiale, il dépeint le contraste entre rêve et réalité au moment de la chute d’un état, la DDR, ainsi que sa lente évolution jusqu’à la société actuelle. En s’appuyant sur les dichotomies de la liberté et de la solidarité d’une part, de la haine et de la tension d’autre part, l’auteur développe dans la deuxième partie de son dernier livre Aus der Traum (Kartei) (« Hors le rêve (fiches) ») l’idée d’une résistance guidée par l’imaginaire contre le culte de la réalité crue.
Pour un recueil de poésie, le titre est provocateur. Les intentions de l’auteur sont très claires : « dans l’ensemble, ce qu’on appelle la réalité est largement surestimé ». Dans la première partie de son livre, il s’élance donc avec toute la force de l’imaginaire dans la zone obscure de ladite réalité, que la plupart s’obstinent à considérer comme unité de référence pour tout type d’expérience.
Du dossier qui renferme ses « fiches », classées et ordrées, il tire une véritable trouvaille littéraire, qu’on peut ouvrir à n’importe quelle page sans jamais craindre d’être déçu.
Série de conversation « perspectives »
Aus der Traum (Kartei) (« Hors le rêve (fiches) »). Notes et articles. Suhrkamp Verlag 2019
Zündkerzen (« Bougies d’allumage »). Poèmes. Suhrkamp Verlag 2017
Die Jahre im Zoo. Ein Kaleidoskop (« Années au zoo. Un kaléidoscope. »). Suhrkamp Verlag 2015
Rolf Hermann
Rolf Hermann, né en 1973 à Loèche, a étudié la littérature anglaise et allemande. Il a financé ses études en travaillant comme berger dans le Simplon. Rolf Hermann est membre du groupe d’auteurs Die Gerbirgspoeten (« Poètes des sommets »), qui écrivent en dialecte. Ses textes ont été partiellement traduits en arabe, en anglais, en français, en lituanien, en polonais et en espagnol. Rolf Hermann vit aujourd’hui avec sa famille à Bienne. Il écrit surtout de la poésie, de la prose, des pièces radiophoniques, du spoken word et des textes de théâtre, en allemand comme en dialecte.
Avec son recueil de nouvelles Flüchtiges Zuhause (« Chez-soi fugace »), Rolf Hermann jette un regard rétrospectif sur son enfance et sa jeunesse en Valais. Les sept récits sont de véritables perles littéraires, rédigées avec beaucoup de raffinement. Avec chaleur et délicatesse, Hermann esquisse dans une langue imagée et précise l’univers de trois générations. Il raconte les nostalgies secrètes, les rêves inaccomplis, les univers modifiés, les au revoir discrets… et met des mots sur la pratique qui confère de la durée aux choses et aux personnes qu’on aime : l’écriture. Comme le dit Manfred Papst dans sa laudatio : « Dans son écriture, Rolf Hermann risque tout. Il perpétue la tradition de Robert Walser et le geste de la disparition. Et il sait que toute écriture vient de la solitude. »
Flüchtiges Zuhause (« Chez-soi fugace »). Nouvelles. Edition Blau. Rotpunktverlag 2018
Das Leben ist ein Steilhang (« La vie est une corniche »). edition spoken script 22. Der gesunde Menschenversand 2017
Kartographie des Schnees. (« Cartographie de la neige »). Poèmes. Der gesunde Menschenversand 2014
Federico Italiano
Federico Italiano, né en 1976, travaille comme auteur, traducteur et éditeur à Vienne, où il est également chercheur à la Österreichische Akademie der Wissenschaften. Il enseigne la littérature générale et comparée à la LMU de Munich.
En tant que traducteur vers l’italien, il a surtout travaillé sur des poètes modernes et contemporains comme César Vallejo, Philippe Soupault, Vicente Aleixandre, Elizabeth Bishop, Michael Krüger, Durs Grünbein, Lutz Seiler ou encore Jan Wagner.
Son premier recueil de poèmes, Nella costanza, est paru en 2003, rapidement suivi par d’autres, qui tous ont reçu d’excellentes critiques des médias italiens.
Federico Italiano est originaire de Novara, « nato e cresciuto tra le risaie piemontesi / dove onde minuscole screziano / la perfezione dei rettangoli e dei trapezi », mais vit dans l’espace germanophone depuis longtemps. Il écrit ses poèmes en exil linguistique, comme le dit le titre de son recueil Un esilio perfetto (2015) : en italien, mais sur un territoire de langue allemande. Au sujet de l’Italie, lieu de résonnance de ses poèmes, il dit : « Je me sens comme une sorte d’éclaireur. Chaque fois que j’écris, c’est comme si je lançais quelque chose. Je dois toujours commencer par lancer mes mots par-dessus les Alpes. » Avec son collègue allemand Jan Wagner, il dirige l’anthologie « Grand Tour. Voyage à travers la jeune poésie européenne » (Grand Tour. Reisen durch die junge Lyrik Europas).
En collaboration avec la Deutsche Akademie für Sprache und Dichtung pour le projet « L’Europe en poème – Grand tour » (« Europa im Gedicht – Grand Tour »).
Recueils en italien :
Un esilio perfetto. Poesie scelte 2000–2015. Feltrinelli Editore 2015
L’impronta. Aragno 2014
L’invasione dei granchi giganti. Marietti 2010
Die Erschliessung des Lichts. Italienische Dichtung der Gegenwart (« L’Ouverture de la lumière. Poésie italienne contemporaine »). Anthologie. Federico Italiano et Michael Krüger (dir.). Hanser 2013
Andreas Jandl
Andreas Jandl, né en 1975, travaille depuis 2000 comme traducteur du français et de l’anglais. Il vit à Berlin. En plus de pièces de théâtre et de livres de littérature jeunesse, il traduit principalement des essais littéraires et des romans, notamment de J.A. Baker, Nicolas Dickner, David Diop, Mike Kenney, Marie-Renée Lavoie, Robert Macfarlane et Gaétan Soucy. Il a reçu en 2017 le Prix de traduction Christoph Martin Wieland.
En collaboration avec le CTL.
Pedro Lenz
Pedro Lenz compte parmi les voix les plus importantes de la littérature suisse en dialecte. Les textes encensés de l’écrivain né en 1965 doivent beaucoup à son don d’observation et s’inspirent largement de sa propre biographie : avant l’obtention de son diplôme de maturité et ses quelques semestres d’études en littérature espagnole, il a travaillé sept ans durant comme maçon sur les chantiers. Depuis 2001, il se consacre entièrement à l’écriture, rédige des chroniques pour divers journaux et magazines, ainsi que des textes pour des groupes de théâtre et la radio suisse SRF.
Ses textes ne portent pas sur la « haute culture » des critiques, mais bien sur le quotidien, sur le monde du travail d’humains pétris de rêves et de mélancolie. Les textes de Lenz font souvent parler des personnes qui ne se débrouillent pas très bien dans la vie. Il produit ainsi des histoires banales et tragiques, qui ne laissent certes pas indemne, mais qui ravissent aussi.
Son roman de spoken word Der Goalie bin ig (en français « Faut quitter Schumertal ») a fait de lui l’un des auteurs suisses les plus connus. Ce best-seller n’a pas seulement reçu de nombreux prix et fait l’objet d’une mise en scène, il a aussi été adapté au cinéma avec succès et a été traduit dans plusieurs langues – bien qu’il s’agisse d’un roman en dialecte.
Avec Der Liebgott isch ke Gränzwächter (« Le bon Dieu n’est pas garde-frontière »), Lenz présente un recueil de quarante-quatre chroniques intelligentes, tolérantes et pleines d’humour.
Der Liebgott isch ke Gränzwächter. 44 Mundartkolumnen (« Le bon Dieu n’est pas garde-frontière »). Cosmos Verlag 2018
Die schöne Fanny (« La belle Fanny »). Roman. Kein & Aber 2017
Di schöni Fanny (« La belle Fanny »). Roman. Cosmos Verlag 2016
Der Gondoliere der Berge (« Le Gondolier des montagnes »). Cosmos Verlag 2015
Radio. Morgengeschichten (« Radio. Histoires matinales »). Verlag Der gesunde Menschenversand 2014
Frances Leviston
Frances Leviston, née en 1982 à Édimbourg, a étudié l’écriture créative. Elle travaille aujourd’hui comme écrivaine à Durham et enseigne au sein du programme d’écriture créative de l’Université de Manchester.
Frances Leviston a publié deux recueils de poèmes : Public Dream (2007), nominé pour le Prix T. S. Eliot, et Disinformation (2015), inclus dans la short list de l’International Dylan Thomas Award.
Sa poésie atteste d’un rare sérieux et de très larges connaissances. Elle maîtrise parfaitement les codes poétiques et présente de grandes compétences dans le cisèlement de ses vers. La densité et la complexité, chez Frances Leviston, prennent toujours un aspect simple et léger. Elle met en œuvre une langue vivante, et démontre que pour elle, la poésie se rapproche d’une sorte de savoir.
Frances Leviston a une voix particulière, qui se distingue des autres. Elle a été influencée notamment par Elizabeth Bishop, comme en témoigne son poème « Bishop in Louisiana ». À la question du Financial Times au sujet de l’importance que revêt pour elle son activité de poétesse, elle répond : « Être poétesse signifie pour moi à chaque poème quelque chose de nouveau ; mais on pourrait dire qu’il s’agit principalement de traiter la langue comme une chose animée, avec une vie propre : non pas comme un outil dont on se sert, mais comme une forme d’intelligence avec laquelle il s’agit de collaborer. »
En collaboration avec la Deutsche Akademie für Sprache und Dichtung pour le projet « L’Europe en poème – Grand tour » (« Europa im Gedicht – Grand Tour »).
Recueils en anglais :
Disinformation. Picador 2015
Public Dream. Picador 2007
Johanna Lier
Johanna Lier, née en 1962, a commencé son travail artistique en tant qu’actrice. Elle s’est fait connaître grâce à son rôle de la fille Belli dans Höhenfeuer (en français L’Âme-sœur) de Fredi Murer. Elle est ensuite passée à la littérature, en publiant quelques recueils de poèmes et des pièces de théâtre. Elle travaille aujourd’hui comme poétesse, enseignante et journaliste à Zurich. Des recherches et des séjours prolongés l’ont menée en Iran, au Niger, au Chili, en Ukraine, en Israël et en Argentine.
Dans son dernier roman Wie die Milch aus dem Schaf kommt (« Comme le lait sort du mouton »), l’héroïne Selma, après une trouvaille inattendue dans la succession de sa grand-mère Pauline, part en voyage d’abord en Thurgovie, puis en Ukraine et en Israël. Mais ce périple la conduira surtout à se découvrir elle-même. L’invention de souvenirs, l’affabulation, l’étude du présent et des rencontres faites au gré du hasard, c’est ce genre de techniques qui lui permettront de combler les lacunes du passé. Cette histoire familiale, inspirée de sa propre biographie, raconte l’histoire de vagabonds désargentés et sans papier qui fondent une fabrique de pâtes dans la Suisse de l’Est. Le récit d’un voyage dans le Sud et dans les abysses d’un passé familial se mêle à l’histoire suisse de l’industrie et de l’immigration au XIXème siècle. Une recherche de ses propres origines, toujours ambivalentes, qui ne s’effectue jamais sans un certain malaise.
Wie die Milch aus dem Schaf kommt (« Comme le lait sort du mouton »). Roman. Brotsuppe Verlag 2019
Bring mir Jagdfang (« Apporte-moi du gibier »). Roman. Offizin Verlag 2016
Tanja Maljartschuk
Tanja Maljartschuk, née en 1983, a grandi en Ukraine, où elle a travaillé quelques années comme journaliste et écrivaine. Elle écrit régulièrement des chroniques pour la Deutsche Welle (Ukraine) et pour le Zeit Online. Elle vit et travaille à Vienne depuis plusieurs années. Elle a gagné le Prix Bachmann en 2018 pour son premier texte écrit en allemand.
Dans son dernier roman, Blauwal der Erinnerung (« La Baleine bleue du souvenir »), elle raconte l’histoire du héros ukrainien Wjatscheslaw Lypynskyj, dont elle lie subtilement la vie à celle de la narratrice. Cette dernière cherche dans son passé des traces qui lui permettraient de comprendre son propre présent. Lypynskyj s’est toujours engagé en faveur de l’Ukraine, déchirée entre la Pologne et la Russie, et a lutté toute sa vie pour l’indépendance de son pays. La narratrice, dont l’hypocondrie et la recherche d’appartenance rappellent celles de cette figure historique, suit la trace de cet homme intransigeant et fier pour affronter, grâce au souvenir, le déracinement soviétique. Un roman qui impressionne par sa qualité littéraire, et qui fait la démonstration d’une identité conditionnée par la peur, l’obéissance et l’oubli.
Dans les mots du Frankfurter Rundschau : « Ce qui console à la lecture de ce roman, c’est la force de son désespoir. La baleine bleue referme ses mâchoires, et poursuit sa nage. »
Blauwal der Erinnerung (« La Baleine bleue du souvenir »). Roman. Traduit de l’ukrainien par Maria Weissenböck. Kiepenheuer&Witsch 2019
Von Hasen und anderen Europäern: Geschichten aus Kiew (« Au sujet des lapins et autres européens : histoires de Kiev »). Nouvelles. Traduit de l’ukrainien par Claudia Dathe. Edition.fotoTAPETA Berlin 2014
Biografie eines zufälligen Wunders (« Biographie d’un hasard merveilleux »). Roman. Traduit de l’ukrainien par Anna Kauk. Residenz Verlag 2013
Petros Markaris
Petros Markaris, fils d’un commerçant arménien et d’une mère grecque, est né en 1937 à Istanbul, où il a grandi et où il a fréquenté une école allemande. C’est pour cela que Markaris écrit aussi bien en grec qu’en turc ou en allemand. Il vit à Athènes depuis de nombreuses années.
Il est l’auteur de plusieurs pièces de théâtre, il est à l’origine d’une série télévisée policière très populaire en Grèce et a régulièrement collaboré avec Theo Angelopoulos. Il a également traduit des pièces allemandes vers le grec, et écrit depuis les années 1990 des romans policiers qui lui ont valu un succès international.
Il a travaillé avec Theo Angelopoulos, réalisateur de cinéma d’auteur, pendant plus de vingt ans. Dans son journal intitulé Tagebuch einer Ewigkeit (« Journal d’une éternité »), Markaris raconte la genèse du film Die Ewigkeit und ein Tag (« L’Éternité et un jour »). Il revient avec fougue et tendresse sur la collaboration avec son cher ami, et évoque leurs promenades et discussions au sujet de livres, de films et du casting. En suivant leurs échanges, on comprend peu à peu comment, dans le processus de création, humour et sérieux vont de pair, et comment la littérature et le grand cinéma naissent.
Ce document authentique paraît accompagné de photos inédites prises sur le set, d’une préface de Theo Angelopoulos et d’une postface exclusive de l’auteur pour cette première édition allemande.
Tagebuch einer Ewigkeit: Am Set mit Angelopoulos (« Journal d’une éternité : sur le set avec Angelopoulos »). Traduit du grec par Michaela Prinzinger. Diogenes 2019
Drei Grazien: Ein Fall für Kostas Charitos (« Trois grâces : un cas pour Kostas Charitos »). Roman. Traduit du grec par Michaela Prinzinger. Diogenes 2018
Offshore: Ein Fall für Kostas Charitos (« Offshore : un cas pour Kostas Charitos »). Roman. Traduit du grec par Michaela Prinzinger. Diogenes 2017
Der Tod des Odysseus (« La mort de l’odyssée »). Récits. Traduit du grec par Michaela Prinzinger. Diogenes 2017
Francesca Melandri
Francesca Melandri, née en 1964 à Rome, a abord été scénariste. Son premier roman Eva schläft (« Eva dort ») l’a fait connaître du grand public, en Italie comme en Allemagne. Son deuxième roman Über Meereshöhe (« Plus haut que la mer ») a été qualifié d’œuvre d’art par la critique italienne.
Dans son dernier livre Alle, ausser mir (« Tous, sauf moi »), Melandri aborde la cruelle histoire coloniale italienne, souvent passée sous silence. Sous le fascisme, l’Italie n’a reculé devant rien pour imposer sa politique coloniale en Abyssinie (aujourd’hui l’Éthiopie), allant jusqu’à instituer des lois raciales et provoquer des génocides. L’autrice raconte cette histoire oubliée à travers une saga familiale, au centre de laquelle se trouve Ilaria, une enseignante romaine dont l’univers est soudain chamboulé par un jeune Éthiopien qui prétend être le petit-fils de son père. Un à un, les secrets de famille de trois générations éclatent au grand jour. Ilaria se renseigne sur l’occupation italienne de l’Éthiopie et sur la politique migratoire actuelle. Elle remonte le fil de toute une succession d’évènements qui jettent une nouvelle lumière sur certains conflits ainsi que sur la responsabilité de l’Europe dans les mouvements migratoires d’aujourd’hui. Francesca Melandri décrit avec des mots puissants la désagrégation du débat public et permet d’établir un lien entre la vulgarité de Berlusconi, l’indifférence face à l’histoire et la proclamation d’idéaux humanistes.
Alle, ausser mir (« Tous, sauf moi »). Roman. Traduit de l’italien par Esther Hansen. Wagenbach Verlag 2018
Eva schläft (« Eva dort »). Roman. Traduit de l’italien par Bruno Genzler. Wagenbach Verlag 2018 (initialement publié chez Blessing 2011)
Über Meereshöhe (« Plus haut que la mer »). Roman. Traduit de l’italien par Bruno Genzler. Wagenbach Verlag 2019 (initialement publié chez Blessing 2012)
Eman Mohammed Turki
Eman Mohammed Turki est née à Ajman. Après des études en communication, elle a travaillé dans le secteur des médias, notamment en tant que journaliste culturelle. Elle a été rédactrice en chef du magazine Al Rajul Al Youm et a publié dans différents journaux des Émirats arabes unis. Elle a également rédigé des rapports internationaux pour l’Agence France-Presse (AFP). Elle est responsable de la communication pour le Ministère du tourisme et de la culture d’Abu Dhabi. Eman Mohammed Turki a publié deux recueils de poèmes, En Ghabat Al Sidra Wa En Ebtada Al Bahr (en anglais : If the Sidra was Absent, the Sea Became Distant) et Ghorfa Muwareba (en anglais : Illusive Room). Elle est également l’autrice d’un poème mis en scène par Akira Takayama dans Hetrotopia Abu Dhabi, une pièce qui se jouait dans l’entier de la ville d’Abu Dhabi.
À Loèche-les-Bains, Mariam Al-Saedi et Eman Mohammed Turki liront des nouvelles traductions de leurs textes et témoigneront ensemble lors d’une table ronde avec Nora Amin de la condition d’autrice dans les pays arabes.
Gianna Molinari
Gianna Molinari, née en 1988, a étudié à l’Institut littéraire suisse de Bienne et à l’Université de Lausanne. Elle vit actuellement à Zurich, où elle a co-fondé le groupe d’action artistique Literatur für das, was passiert (« Une littérature pour ce qui se passe »), qui vient en aide aux requérant·e·s d’asile.
Son premier roman Hier ist noch alles möglich (« Ici tout est encore possible ») suit une protagoniste anonyme dans l’enceinte d’une usine à la périphérie de la ville. On ne sait presque rien de sa vie antérieure. En tant que veilleuse, elle surveille la zone de l’usine en voie de désaffectation, qui se vide peu à peu. On soupçonne un loup de s’être introduit dans l’enceinte. Dans ce non-lieu, coincé quelque part entre passé et futur, le loup devient pour elle une obsession existentielle et incarne sa recherche et son besoin de stabilité. Avec sa langue franche et détachée, Molinari redonne vie à ce triste monde, sans emprunts linguistiques, sans subordonnées, sans ornements ni paillettes. Molinari décortique chaque phrase jusqu’à n’en garder plus que le noyau, la transformant en un son unique qui précipite la lecture. Si l’histoire fonctionne aussi bien, c’est peut-être aussi parce qu’elle ne fait jamais du loup sa figure principale – comme le ferait un conte –, mais qu’elle se focalise tout du long sur le personnage de la jeune femme. La nuit, elle erre à travers l’usine abandonnée et observe les caméras de surveillance ; le jour, elle part en repérage et cherche des traces. Mais l’animal reste invisible, et aussi mystérieux que la jeune femme qui le traque.
Gianna Molinari sera confrontée aux traducteur·e·s lors du colloque de traduction de cette année.
Hier ist noch alles möglich (« Ici tout est encore possible »). Roman. Aufbau Verlag 2018
Terézia Mora
Terézia Mora est née en 1971 en Hongrie et a grandi entre deux langues, dans un petit village proche de la frontière austro-hongroise. Elle-même dit que son enfance dans ce village pauvre et décati l’a beaucoup marquée. Elle a étudié à Berlin, où elle vit aujourd’hui avec sa famille. Elle travaille comme autrice et traductrice, notamment de Zoltán Danyi.
Dans ses romans et nouvelles, Terézia Mora donne voix aux marginaux et aux apatrides, aux existences précaires, aux humains qui sont en quête. Elle touche ainsi aux blessures de notre époque. Elle décrit sans ménagement l’égarement des nomades urbains et sonde les abîmes de l’étrangeté intérieure et extérieure. Elle le fait avec une langue suggestive mais non moins puissante, imagée et intense, avec des accents d’ironie, des jeux de mots irisés et une grande précision analytique. La plupart de ses textes dans le recueil Die Liebe unter Aliens. (« L’amour entre aliens ») porte sur le temps qui file, le temps qu’on n’emploie pas, qu’on ne récupèrera pas et qui ne suffit jamais. Elle semble discrètement y suggérer la vision d’un autre monde, d’un monde possible – et possiblement meilleur. Mora transforme les particularités de notre présent en personnages et fait la part belle à l’utopie dans ses textes. Elle écrit sur le malheur, mais sans sentimentalisme, sur des figures décalées, mais sans bizarrerie. Là réside tout l’art de sa plume.
Terézia Mora et Zoltán Danyi sont nominés avec Der Kadaverräumer (« Le Ramasseur de cadavres ») pour le Prix international de la Haus der Kulturen der Welt.
Die Liebe unter Aliens (« L’amour entre aliens »). Nouvelles. Luchterhand Literaturverlag 2016
Das Ungeheuer (« Le Monstre »). Roman. Luchterhand Literaturverlag 2013
Der einzige Mann auf dem Kontinent (« Le seul homme du continent »). Roman. Luchterhand Literaturverlag 2009
Adolf Muschg
Adolf Muschg, né en 1934, présente avec Heimkehr nach Fukushima (« Retour à Fukushima ») un roman qu’on pourrait qualifier de fringant, élégant et constellé de merveilles. Bien qu’il raconte la fin de tout, il se lit facilement. Et l’histoire d’amour qui s’y déroule est si improbable, qu’on ne la croit que trop volontiers.
La catastrophe de Fukushima n’est pas encore de l’histoire ancienne, loin de là – même si au Japon, tout le monde fait comme si. Dans son dernier roman, Muschg suit Paul Neuhaus, un ancien architecte en visite chez un couple d’amis japonais – sans prêter attention aux dangers de l’invitation. En effet, le couple se destine à être le premier à se réinstaller sur un territoire qui avait dû être évacué. L’État souhaite repeupler les zones les moins exposées et lance cette initiative en construisant un premier lotissement factice.
Paul Neuhaus et sa guide japonaise rencontrent alors un homme qui continue de nourrir les bœufs laissés sur place, bien qu’ils ne soient plus d’aucune utilité. « Peut-être que la fin a déjà eu lieu », s’interroge-t-il, « sauf qu’on ne s’en aperçoit pas et que c’est moins douloureux que ce qu’on pensait. » Celina Koffka écrit dans le Mannheimer Morgen au sujet de Heimkehr nach Fukushima : « Le roman de Muschg donne à ressentir la catastrophe atomique et la vie qui s’ensuit comme les médias ne sauront jamais le faire. » Le roman est aussi une introduction à la culture et au style de vie japonais, ainsi qu’une lecture documentaire d’un quotidien qui ne se joue plus contre la montre, mais bien contre le compteur Geiger.
Heimkehr nach Fukushima (« Retour à Fukushima »). Roman. C.H. Beck Verlag 2018
Der weisse Freitag. Erzählung vom Entgegenkommen (« Le vendredi blanc. Récit d’une concession »). C.H. Beck Verlag 2017
Die japanische Tasche (« Le Sac japonais »). Roman. C.H. Beck Verlag 2015
Madame Nielsen
Madame Nielsen est né sous le nom de Claus Beck-Nielsen en 1963 dans le Jutland, au Danemark. Il est parti à New York dans les années 1990 et est devenu membre d’un groupe de performance. Au cours des années 2000, Claus Nielsen a vécu dans la rue, sans papier. En 2001, il déclare la mort de Claus Nielsen pour devenir, quelques années plus tard, Madame Nielsen. Depuis 2013, elle écrit des romans sous ce nom.
Son dernier livre traduit en allemand, Der endlose Sommer (« L’été infini »), est aussi scintillant, sinueux et insaisissable que l’est son autrice. Un petit groupe de gens, pris par le jeu de l’amour, de l’amitié et de l’art, est projeté hors du temps et atterrit dans un été infini, dans lequel tout est possible, et qui bouleversera leur destin. La spécificité de Der endlose Sommer ne réside pas tant dans son histoire, mais dans sa langue et dans ce qu’elle déclenche à la lecture. La forme n’est pas juste un moyen qui mène à la fin. Forme et contenu se fondent l’un dans l’autre. La langue ne s’offre qu’au lecteur qui accepte de la suivre avec une attention absolue ; elle peut se révéler aussi nébuleuse et chimérique que l’histoire l’est à certains endroits.
Madame Nielsen ne pense pas au lecteur. Elle ne cherche pas à raconter une histoire. Elle laisse le lecteur seul face à de nombreuses lacunes, à des personnages qui semblent à moitié esquissés, et à un texte qui ignore ordre et chronologie. C’est l’art qui lui importe. Der endlose Sommer est une performance couchée sur papier : une performance littéraire.
En collaboration avec le DAAD Berlin.
Der endlose Sommer (« L’été infini »). Roman. Traduit du danois par Hannes Langendörfer. Kiepenheuer & Witsch 2018
Alan Pauls
Alan Pauls, romancier argentin, essayiste, critique et scénariste, est né en 1959 à Buenos Aires. Il a étudié la littérature, a enseigné la théorie littéraire et a travaillé comme rédacteur pour divers quotidiens. Il s’est fait connaître internationalement avec son quatrième roman Die Vergangenheit (« Le Passé »), primé et adapté au cinéma. Il vit à Buenos Aires.
Dans sa trilogie romanesque, Pauls aborde sans fards le thème du passé politique, c’est-à-dire de la dictature militaire des années 1970. Le roman Geschichte der Tränen (« Histoire des larmes ») raconte l’évolution du fils cultivé d’une famille progressiste de la classe moyenne, avec en arrière-plan les luttes idéologiques des années 1970. L’histoire tourne autour de la confrontation du jeune protagoniste avec ses contemporains et avec les évènements marquants de son époque. Le roman Geschichte der Haare (« Histoire des cheveux ») nous apprend qu’une coupe de cheveux ne relève pas tant de l’apparence, mais qu’elle prend directement racine dans l’âme de l’être qui la porte. Elle constitue ainsi le miroir idéal d’une époque, où se reflètent espoirs, attitudes et échecs générationnels. Dans le troisième roman, Geschichte des Geldes (« Histoire de l’argent »), le narrateur finit par devoir payer sa dette, et ce dans tous les sens du terme : des redevances que personne n’assume, des investissements absurdes et des commerces secrets – ce qui permet une observation intense et fouillée de la perdition humaine et des économies dissimulées.
L’écrivain chilien Roberto Bolaño a dit d’Alan Pauls qu’il était « l’un des meilleurs écrivains vivants de toute l’Amérique du Sud ».
En collaboration avec le DAAD Berlin
Geschichte des Geldes (Orig.: Historia del dinero, « Histoire de l’argent »). Roman. Traduit de l’espagnol par Christian Hansen. Klett-Cotta 2016
Geschichte der Haare (Orig.: Historia del Pelo, « Histoire des cheveux »). Roman. Traduit de l’espagnol par Christian Hansen. Klett-Cotta 2012
Geschichte der Tränen (Orig.: Historia del llanto, « Histoire des larmes »). Roman. Traduit de l’espagnol par Christian Hansen. Klett-Cotta 2010
Antoinette Rychner
Antoinette Rychner, née en 1979, a d’abord fait un apprentissage de technicienne de théâtre avant d’étudier à l’Institut littéraire de Bienne. Elle a travaillé dans divers théâtres suisses romands avant d’écrire elle-même des pièces.
Avec Le Prix, Antoinette Rychner présente un roman moderne, subtil et délicat, truffé d’images étonnantes. Un sculpteur obsédé par l’ambition de gagner un prix vit la souffrance de tou·te·s les artistes : il n’a ni le temps, ni le calme, ni la force nécessaires au contrôle de son processus créatif. S’il n’y avait pas les autres, tout serait différent. Sa famille, sa femme S, et surtout Mouflet et Remouflet : ils sont bruyants, ils le harcèlent, et ils exigent tant d’amour de sa part qu’ils l’empêchent d’exercer correctement son métier. L’appel de la muse est irrésistible, et tant qu’il n’aura pas gagné le prix, le sculpteur ne sera pas heureux. Mais il finit par se demander : que gagnerait-il au juste avec ce prix ? À quoi mesure-t-on le succès ? Et quand est-on enfin celui que l’on veut être ? Le Prix est une réflexion critique sur la soif de reconnaissance et sur la façon dont on se perçoit en tant qu’artiste. C’est un livre intelligent, dépourvu de kitsch, qui parle de volonté, de temps, de quotidien, d’espoir et d’amour.
Der Preis. Roman. Traduit du français par Yla M. von Dach. Brotsuppe Verlag 2018
Le Prix. Roman. Buchet/Chastel 2015
Géraldine Schwarz
Géraldine Schwarz est née en 1974 à Strasbourg d’une mère française et d’un père allemand. Elle est autrice, documentariste et journaliste et a déménagé en Allemagne pour y travailler en tant que correspondante de l’AFP. Elle vit aujourd’hui à Berlin.
Dans son livre Les Amnésiques, Géraldine Schwarz émet une thèse intéressante : les mouvements de la droite populiste qui essaiment actuellement en Europe découleraient de la façon dont le continent, après la Deuxième Guerre mondiale, s’est confronté à sa propre histoire. Dans cette réflexion, Schwarz met en lien l’histoire de sa famille franco-allemande avec l’histoire universelle. Nous apprenons ainsi comment son grand-père, qui a hérité d’une entreprise juive aux prémisses de l’aryanisation, a refusé de payer des réparations au seul survivant de la famille de fabricants, assassinée à Auschwitz. Quant à son grand-père maternel, il a collaboré au régime de Vichy en aidant à arrêter des juifs lors de razzias. Le contraste entre les différentes façons que les pays ont eu de se confronter à leur propre histoire devient alors évident : tandis qu’en Allemagne, les sujets de la responsabilité et de la complicité sont régulièrement évoqués, en France ils ont tout simplement été mis de côté. Les Amnésiques est une œuvre très personnelle au sujet de la culture de la mémoire. Ce livre, rédigé avec soin et pourvu de multiples exemples, plaide pour un maintien constant du travail de mémoire, seul moyen de faire obstacle aux tendances nationalistes et populistes. Son message n’est certes pas nouveau, mais il est plus que jamais nécessaire.
Série de conversation « perspectives »
Die Gedächtnislosen. Erinnerungen einer Europäerin (Orig.: « Les Amnésiques »). Traduit du français par Christian Ruzicska. Secession Verlag 2018
Vladimir Sorokin
Vladimir Sorokin, né en 1955, est l’un des écrivains russes contemporains les plus importants. Sorokin est un critique acerbe de l’élite politique russe et a souvent fait l’objet d’attaques de la part de partisans du régime.
Son dernier livre Manaraga. Tagebuch eines Meisterkochs (« Manaraga. Journal d’un chef ») entraîne dans une folle épopée à travers la littérature mondiale et les greniers d’antiquaires. Ce roman foisonne de bons mots, et ravit par son humour renversant ainsi que par son élégante fourberie.
Au XXIème siècle, les bibliomanes ne dévorent plus Gorki, Proust et Mann ; ils laissent les flammes s’en charger. Les textes de la littérature mondiale sont les combustibles de l’avenir et participent à un nouvel art culinaire nommé le « book’n’grill ».
Ce roman est aussi un sous-texte amer de la situation politique actuelle, du malaise européen en général et du désastre russe en particulier ; le fait que des livres de Sorokin aient été brûlés par des alliés de Poutine n’a rien d’une fiction. De temps à autre, Sorokin lance un clin d’œil malicieux à son collègue Michel Houellebecq ; mais s’ils se présentent tous deux comme des prophètes de l’effondrement, Sorokin se révèle bien plus divertissant que le grand écrivain français.
Le narrateur dans ce « journal » est Géza, un pro du métier élitiste mais illégal de la grillade au feu de livres. Il s’est spécialisé en littérature russe. Son statut de chef culinaire fait de lui une véritable star : il fait le tour du monde en jet privé, ne brûle que le meilleur de la littérature, gagne des millions et s’amuse comme un fou. Et ce même en Suisse, à la montagne, où il brûle juste à côté de Loèche-les-Bains (Vladimir Sorokin était invité au Festival de littérature de Loèche-les-Bains en 2016) un exemplaire de Zarathustra.
Manaraga. Tagebuch eines Meisterkochs (« Manaraga. Journal d’un chef »). Roman. Traduit du russe par Andreas Tretner. Kiepenheuer & Witsch 2018
Telluria. Roman. Traduit du russe par le collectif Hammer und Nagel. Kiepenheuer & Witsch 2015
Der Schneesturm (« La Tempête de neige »). Roman. Traduit du russe par Andreas Tretner. Kiepenheuer & Witsch 2012
Ré Soupault
Ré Soupault est née en 1901 sous le nom d’Erna Niemeyer en Poméranie et est décédée en 1996 à Paris. Durant ses études au Bauhaus à Weimar (1921-1925), elle a travaillé avec l’avant-gardiste Eggeling à son film expérimental « Diagonal-Symphonie ». Ces années d’études au Bauhaus l’ont marquée. Elle a été l’élève de Wassily Kandinsky, Paul Klee et Oskar Schlemmer.
Persévérante, dynamique et fourmillante d’idées, elle développe un projet très ambitieux : ouvrir son propre studio de mode à Paris. Elle avait déjà travaillé comme dessinatrice chez un éditeur de mode à Berlin, suite à la fermeture du Bauhaus en 1925. Le destin l’entraîne de Weimar aux plus grandes métropoles, comme Paris et Berlin, la plongeant ainsi au cœur du courant surréaliste. Par la suite, cette nomade des temps modernes a séjourné en Tunisie, en Amérique du Nord et du Sud, en Suisse et enfin à nouveau à Paris. Elle s’est toujours facilement adaptée à chacune de ses nouvelles situations de vie, n’hésitant jamais à tout laisser derrière elle pour prendre un nouveau départ.
À partir de 1946, elle a également travaillé comme traductrice (notamment d’André Breton et de Philippe Soupault), et comme autrice pour la radio. Elle compte parmi les artistes les plus importantes du XXème siècle.
L’œuvre photographique de Ré Soupault n’a été redécouverte qu’à la fin des années 1980. Quelques-unes de ses photographies seront exposées pendant le Festival de littérature de Loèche-les-Bains dans l’Ancienne Galerie St. Laurent.
Vom Dadaismus zum Surrealismus (« Du dadaisme au surréalisme »). Deux essais. Manfred Metzner (dir.). Wunderhorn Verlag 2018
Nur das Geistige zählt. Vom Bauhaus in die Welt (« Il n’y a que l’esprit qui compte. Du Bauhaus au monde »). Souvenirs. Manfred Metzner (dir.). Wunderhorn Verlag 2018
Katakomben der Seele. Eine Reportage über Westdeutschlands Vertriebenen- und Flüchtlingsproblem 1950 (« Les Catacombes de l’âme. Un reportage sur le problème des migrants et des exclus de l’Allemagne de l’Est, 1950 »). Manfred Metzner (dir.). Wunderhorn Verlag 2016
Aleš Šteger
Aleš Šteger, né en 1973 à Ptuj, en Yougoslavie, est un poète, écrivain, éditeur, traducteur et journaliste slovène de renom. Il a étudié à Ljubljana, où il travaille et vit encore aujourd’hui. Il a reçu de nombreux prix pour ses poèmes, traduits en plusieurs langues et publiés dans des revues de littérature du monde entier. Depuis deux ans, il est également membre de l’Académie des Arts de Berlin.
Une fois par an, Aleš Šteger entame un Logbuch der Gegenwart (« Journal de bord du présent »), soit une performance littéraire où il décrit pendant douze heures un seul même endroit, comme par exemple le Mexique, l’Inde ou Fukushima.
Son dernier recueil de poèmes Über dem Himmel unter der Erde (« Au-dessus du ciel au-dessous de la terre ») a vu le jour après son voyage au Japon. Il en a tiré une poésie méditative très similaire au haiku classique. Ses poèmes simples, concentrés et rythmés fascinent par leur précision, leurs couleurs flamboyantes et leur regard scrupuleux. Šteger impressionne par sa facilité à initier un continuum métaphysique avec simplicité et humilité. Il allie forces humaines et célestes, parole et silence, histoire et présent. Sa poésie, caractérisée par une grande légèreté dans le regard, renferme de nombreuses thèses philosophiques tout aussi inspirantes que prudentes. Au sujet d’Aleš Šteger, Marica Bodrozic dit : « Enfin quelqu’un qui rafraîchit l’esprit de la poésie et qui écrit des poèmes dans lesquels l’inévitable et la grâce trouvent leur place. »
Aleš Šteger se produira à Loèche-les-Bains en compagnie de l’accordéoniste Jure Tori.
En collaboration avec la Deutsche Akademie für Sprache und Dichtung pour le projet « L’Europe en poème – Grand tour » (« Europa im Gedicht – Grand Tour »).
Über dem Himmel unter der Erde: Gedichte (« Au-dessus du ciel au-dessous de la terre : poèmes »). Traduit du slovène par Matthias Göritz. Hanser 2019
Archiv der toten Seelen (« Archives des âmes mortes »). Roman. Traduit du slovène par Matthias Göritz. Schöffling Verlag 2016
Logbuch der Gegenwart. Taumeln (« Journal de bord du présent : chanceler »). Traduit du slovène par Matthias Göritz. Préface de Péter Nádas. Haymon 2016
Maria Stepanova
Dans son roman Nach dem Gedächtnis (« Après la mémoire »), Maria Stepanova, née en 1972 à Moscou dans une famille juive, remonte loin dans la généalogie de ses ancêtres. Son histoire familiale a été déterminée par évènements du XIXème et du XXème siècle : les pogroms du régime tsariste, le génocide juif par les nazis, et le harcèlement antisémite sous Staline.
Comment fonctionne la mémoire, et qu’attend-elle de moi ? Voilà l’un des renversements de perspective caractéristiques de Stepanova. Dans Nach dem Gedächtnis, elle propose de regarder depuis l’arrière, voire même depuis l’envers. La mémoire attend-elle quelque chose de nous ? La mémoire rétroactive, dit Stepanova, « change aussi le présent : elle fait de la présence du passé une clé de la vie quotidienne. » C’est comme si, poursuit-elle, « on ne pouvait aimer le passé qu’en étant sûr qu’il n’aura plus jamais lieu. »
En ouvrant le livre, on se surprend à imaginer, étonné et fasciné, qu’il parle de nous. De comment on a rangé l’appartement de nos propres parents. De notre responsabilité ou impuissance face à toutes les réminiscences sonores : notes de piano abîmées, appareils électro-ménagers déficients, dessins d’enfant jaunis, boîtes pleines de lettres indéchiffrables.
Stepanova a inventé une forme contagieuse de littérature : une sorte de collage entre récit autobiographique, recherches biographiques, et essai d’histoire culturelle.
(Ce texte est basé sur la revue de Nach dem Gedächtnis de Barbara Villiger Heilig, publiée le 26.11.2018 dans la Republik.)
Nach dem Gedächtnis (« Après la mémoire »). Roman. Traduit du russe par Olga Radetzkaja. Suhrkamp Verlag 2018
Christian Uetz
Né en 1963 à Egnach, près du lac de Constance, Christian Uetz a étudié la philosophie et ne croit à aucune vérité en-dehors du langage. En prose ou dans le poème, sa façon de se mouvoir dans leurs marges évoque toujours une démonstration de funambulisme au-dessus des abîmes de l’existence. En matière d’intensité de la langue, c’est un véritable virtuose. Lors de ses performances, il récite ses textes par cœur et à un rythme affolant, brouillant ainsi volontairement l’écoute et la compréhension de ses auditeurs. Seule compte la puissance des mots et la force de suggestion des phrases – bien plus que leur contenu.
Dans son recueil de poésie Engel der Illusion (« Anges de l’illusion »), il écrit de façon ludique et souveraine des poèmes sur des sujets complexes : la présence de l’autre en soi, la présence et l’absence, la négativité et la transcendance. Avec ses poèmes forts en images, qui proposent une réflexion profonde, Christian Uetz cherche dans la langue une trace de la présence de ces anges de l’illusion, pour rendre leur apparition palpable. Ses textes provoquent les extases du désir et l’ivresse de la raison. Leur point de fuite reste toujours une affirmation exaltante de la vie et de la sensualité, et une célébration de la langue en tant que sa propre force ; ils révèlent que l‘illusion a toujours une part de vérité, et que l’au-delà fait partie de l’ici-bas.
Engel der Illusion (« Anges de l’illusion »). Poèmes. Secession 2018
Es passierte (« C’est arrivé »). Roman. Secession 2015
Sunderwarumbe Roman. Secession 2012
Nur Du, und nur Ich. Roman in sieben Schritten (« Toi seul, moi seul. Roman en sept pas »). Secession 2011
Aglaja Veteranyi
Aglaja Veteranyi, née en 1962 à Bucarest et décédée en 2002 à Zurich, était issue d’une famille roumaine d’artistes de cirque ; son père était clown, sa mère acrobate. Sa famille a fui la Roumanie en 1967. Au cours des années suivantes, Aglaja Veteranyi s’est produite comme artiste et danseuse. La famille a sillonné l’Europe de l’Ouest, l’Afrique et l’Amérique du Sud, privant Veteranyi d’éducation scolaire. Elle était analphabète. En 1977, la famille s’établit en Suisse. Là, Veteranyi apprend en autodidacte à parler et à écrire l’allemand. Elle suit également une formation de comédienne à la Schauspiel Gemeinschaft Zürich, où elle enseignera plus tard. Elle a écrit des romans, des récits, des poèmes et des pièces de théâtre. Ses textes autobiographiques, dans lesquels elle aborde son enfance difficile, ont été encensés par la critique littéraire pour leur authenticité.
Aglaja Veteranyi s’est enlevé la vie en 2002, au cours d’une crise psychique. Pendant sa brève période de création, elle a rempli de nombreux cahiers de notes et maculé feuille après feuille de son écriture. Elle n’a eu de cesse de tracer, de récrire et d’écrire à nouveau. Ses textes posthumes comptent ainsi un nombre conséquent d’inédits et de publications en journal, réunis maintenant en deux volumes : Café Papa. Fragmente. (« Café Papa. Fragments ») et Wörter statt Möbel. Fundstücke (« Des mots en guise de meubles. Trouvailles »).
Les textes d’Aglaja Veteranyi seront lus au Festival de littérature de Loèche-les-Bains par Tanja Maljartschuk, Pedro Lenz et Rolf Hermann.
Café Papa. Fragmente (« Café Papa. Fragments »). Edition spoken script 29. Der Gesunde Menschenversand 2018.
Wörter statt Möbel. Fundstücke (« Des mots en guise de meubles. Trouvailles »). Edition spoken script 28. Der Gesunde Menschenversand 2018
Hier Himmel (« Ici le ciel »). 30 cartes postales. Der gesunde Menschenversand 2018
Jan Wagner
Jan Wagner, né en 1971 à Hambourg, est poète, essayiste, éditeur et traducteur de poésie anglaise, notamment de Charles Simic, James Tate, Simon Armitage, Matthew Sweeney, Jo Shapcott et Robin Robertson. Il vit depuis 1995 à Berlin.
Il a reçu de nombreux prix pour ses poèmes, qui ont été traduits en plus de 35 langues. Le fait qu’il ait été le premier poète à obtenir le Prix de la Foire du livre de Leipzig en 2015 témoigne aussi de l’évolution de la place de la poésie sur le marché du livre.
Au sujet de son écriture, le taz écrit la chose suivante : « Jan Wagner est un voyageur dans la tradition des romantiques, un marcheur qui s’intéresse aux ‘petites’ choses. ‘Là il y a un maintenant, là il y a un ici.’ Wagner observe le monde avec la conscience de celui qui non seulement sait que ce monde existe – et continue d’exister – sans lui, mais surtout qui s’en réjouit. » Quant à la FAZ, elle le déclare « funambule de la forme », car il sait employer les vers traditionnels sans pour autant se laisser limiter par eux.
En plus de son écriture, Jan Wagner a dirigé un nombre impressionnant d’anthologies, parmi lesquelles Grand tour. Voyages à travers la jeune poésie européenne (« Grand Tour. Reisen durch die junge Lyrik Europas »), co-édité avec son collègue italien Federico Italiano.
En collaboration avec la Deutsche Akademie für Sprache und Dichtung pour le projet « L’Europe en poème – Grand tour » (« Europa im Gedicht – Grand Tour »).
Die Live Butterfly Show. Poèmes. Hanser 2018
Der verschlossene Raum. Beiläufige Prosa (« La Pièce fermée. Prose accidentelle »). Essais. Hanser 2017
Selbstporträt mit Bienenschwarm. Ausgewählte Gedichte 2001–2015 (« Autoportrait et essaim d’abeilles. Poèmes choisis 2001-2015 »). Hanser 2016
Regentonnenvariationen (« Variations de tons de pluie »). Poèmes. Hanser 2014
Nell Zink
Nell Zink, née en 1964 en Californie, a grandi dans la campagne en Virginie. Déjà adolescente, elle écrivait, s’intéressait aux oiseaux et à la nature, et lisait beaucoup. Elle a étudié la philosophie et a exercé différents métiers.
Par conviction, Zink vit en marge de la société. Pour garder intactes son énergie et son inspiration, elle se tient à distance du milieu littéraire. Elle vit aujourd’hui à Bad Belzig, au Sud de Berlin. D’après elle, « ceux qui sont pauvres doivent vivre en Allemagne, ceux qui sont riches peuvent survivre en Amérique. »
Son dernier roman Virginia met en scène une mère, Peggy, et sa fille blonde comme les blés, récemment échappées d’un mauvais ménage. Elles vivent maintenant clandestinement dans un petit village de Virginie, cachées dans une maison abandonnée, se soustrayant aux regards inquisiteurs. Dans cette comédie noire et rythmée, Nell Zink fait l’étalage des contradictions fondamentales de la société américaine, abordant des questions de race, de classe, de genre et de sexualité. Elle pose notamment la question de comment le monde peut en arriver à considérer quelqu’un comme noir, sans même prendre en compte son apparence.
Voir ce feu d’artifice littéraire se consumer peu à peu est un vrai régal. Mais c’est aussi un spectacle qui touche, qui donne à réfléchir et qui laisse sceptique, et c’est à cela qu’on reconnaît une œuvre de Nell Zink, reine de l’ambivalence.
Virginia. Roman. Traduit de l’anglais par Michael Kellner. Rowohlt 2019
Nikotin (« Nicotine »). Traduit de l’anglais par Michael Kellner. Rowohlt 2018
Der Mauerläufer (« Le longeur de mur »). Traduit de l’anglais par Thomas Überhoff. Rowohlt 2016