DE A À Z

Eugenijus Ališanka, Lituanie
Andrej Bitow, Russie
Iso Camartin, Suisse
Jan Christophersen , Allemagne
Anne Cuneo, Suisse
György Dragoman, ongrie
Daniel Goetsch, Suisse
Judith Hermann, Allemagne
Anna Kim, Autriche
Pascale Kramer, Suisse
Sibylle Lewitscharoff, Allemagne
Hugo Loetscher, Suisse
Terézia Mora, Allemagne
Herta Müller, Allemagne
Véronique Olmi, France
Christine Pfammatter, Suisse
Verena Rossbacher, Autriche
Joachim Sartorius, Allemagne
Jochen Schmidt, Allemagne
Daniel Schwartz, Suisse
Peter Stamm, Suisse
Aleš Šteger, Slovénie
Benedict Wells, Allemagne
Andrea Winkler, Autriche
John Wray, USA

Notice nécrologique pour Gert Jonke




EUGENIJUS ALIŠANKA

La Lituanie est un pays de poètes et Eugenijus Ališanka en est l’un des plus importants. C’est aussi un grand voyageur, un «poet on the road» qui dans ses «ungeschriebenen geschichten» («histoires non écrites») conduit son lecteur dans un vaste tour d’Europe. Ses poèmes font apparaître successivement la grande place de Bruxelles, avec ses hordes de fans de football ivres, l’eau de la Seine et ses vaguelettes en plis ou encore l’hôtel Rossija à Moscou, qui éveille des envies d’orgies débridées.
Il s’oriente à travers le continent grâce à une véritable carte des sens, restituant de manière sensible et sensitive l’atmosphère de la culture et la littérature européenne. Il emprunte également le chemin de l’autodérision, se mirant dans l’étang réfléchissant sa condition de voyageur lituanien et d’écrivain de notre temps.
Eugenijus Ališanka n’est pas seulement le poète, essayiste et traducteur le plus important de son pays, il est aussi un lien essentiel entre les cultures. Car s’il offre à coup sûr un rayonnement à la littérature lituanienne à travers le monde, il transporte aussi ce dernier en Lituanie. En tant qu’organisateur au long cours du Festival International «Printemps de la poésie», il a ainsi attiré dans son pays des poètes mondialement connus.
Le poète est né en 1960 alors que ses parents étaient en exil à Barnaul en Russie, non loin du massif montagneux de l’Altaï en Sibérie. Il a ensuite grandi à Vilnius, où il vit encore aujourd’hui. L’oeuvre de ce poète d’Europe de l’est offre un regard nouveau et enrichi sur notre histoire.

ungeschriebene geschichten. Gedichte. DuMont Verlag 2005
Die Rückkehr des Dionysos.
Essays. Athena Verlag 2008



Andrej Bitow

Andrej Bitow est né en 1937 à Leningrad et a étudié la géologie, il vit aujourd’hui entre Moscou et St-Petersbourg. Depuis 1959, il publie des nouvelles, des essais, des romans et des récits de voyage. Récompensé en 1990 du prix Puschkin, il est sans conteste l’un des auteurs les plus importants de Russie. C’est accompagné de sa traductrice qu’il nous rejoindra cette année à Loèche-les-Bains. Cette dernière, Rosemarie Tietze, a traduit une nouvelle fois en allemand son plus beau roman, publié sous le titre «Das Puschkinhaus». Ce somme toute classique roman d’apprentissage fait surgir des personnages et des motifs centraux de la littérature russe. Un véritable «hymne à la grande littérature russe du 19ème siècle», déclarait la traductrice.
En automne 1971 déjà, l’auteur terminait le livre qui parut une première fois en 1978, sans son autorisation. Cela lui valut une interdiction d’exercer. Au début des années quatre-vingt, le roman fut publié en Europe de l’Ouest et beaucoup lu et apprécié. Mais il aura fallu attendre la Perestroïka pour qu’une nouvelle édition, en 1987, élève le roman au rang des classiques modernes russes. Plus de trente ans plus tard, enfin, la traduction intégrale du roman par Rosemarie Tietze paraît en allemand.
A la question d’un journaliste de l’hebdomadaire Die Zeit, qui lui demandait si la vie l’avait privé de quelque chose, Andrej Bitow répondait: «Le découragement est le pire des péchés. Le monde est plus joyeux que nous. (...) Nous mourons, mais le monde ne meurt pas.»

Das Puschkinhaus. Roman. Suhrkamp. 2007
Armenische Lektionen. Suhrkamp 2002
Puschkins Hase. Insel Verlag 1999
Mensch in Landschaft. Insel Verlag 1999
Das Licht der Toten. Insel Verlag. 1990

ISO CAMARTIN

Né en 1944, Iso Camartin est largement connu pour son activité à la télévision suisse alémanique DRS, dont il dirigea jusqu'en 2003 la section culturelle et pour laquelle il anima l’émission «Sternstunde Kunst». Il a en outre fait partie de nombreux jurys, entre autres pour le concours Ingeborg Bachmann à Klagenfurt, en Autriche. Comme écrivain, Iso Camartin s’est révélé explorateur passionné de son propre pays, passeur érudit entre les cultures.
Son dernier livre, «Geschichten des Herrn Casparis» (Histoires de Monsieur Casparis) place en son centre un désuet bibliothécaire. Avant de devenir un personnage principal, Monsieur Casparis avait été créé sur commande pour un essai dans lequel il se questionnait sur la part d’origine et de destinée dans la notion de patrie. Mais très vite il s’en est émancipé, et ses réflexions dans ce nouveau livre dépassent la simple réponse à la question de départ pour rejoindre des considérations sur le monde, les rêves, la communication entre les êtres, la musique, les livres et bien d’autres encore, truffant ses anecdotes de riches et fines pensées sur la vie quotidienne et au-delà.
«Die Deutschen und ihre Nachbarn» est le titre donné par les éditeurs Helmut Schmidt et Richard von Weizsäcker à la série en douze volumes chargée de présenter aux allemands la politique, la société et la culture de leurs voisins européens. Iso Camartin est l’auteur du volume sur la Suisse, paru en 2008. Il propose un regard parfois enthousiaste, parfois ironique et toujours critique sur le fonctionnement du pays et de ses habitants. A travers une écriture toute personnelle, l’auteur expose ce qu’il faut savoir pour comprendre la Suisse, en décompose les mythes et les clichés, et rappelle à quel point l’histoire du pays est marquée par les échanges culturels avec ses différents voisins. La Suisse apparaît alors plus européenne que certains pays membres de l’Union.

Die Geschichten des Herrn Casparis. Geschichten. Beck Verlag 2008
Die Deutschen und ihre Nachbarn: Schweiz. Beck Verlag 2008

Traductions françaises parues à ce jour:
Sils Maria ou le toit de l'Europe. Réflexions et perspectives.
trad. par C. Kowalski. Zoé poche 2006
De le Cohabitation des Langues.
trad. par C. Kowalski. Mini zoé 2000
Rien que des mots? Plaidoyer pour les langues mineures (axé sur le romanche). trad. par C. Kowalski. Editions Zoé (Prix Veillon 1990)

ANNE CUNEO

Anne Cuneo est née en 1936 à Paris de parents italiens. Après plusieurs séjours en Italie, à Lausanne et en Angleterre, elle s’établit définitivement en Suisse. Elle étudie l’anglais, l’italien et l’histoire et dispense des cours de langues et de littérature. En 1967 paraît «Gravé au diamant», sa première publication littéraire. A partir de 1973 elle remplit diverses fonctions à la télévision suisse et publie des romans autobiographiques, puis policiers. Anne Cuneo participe en outre à des projets théâtraux et cinématographiques: elle a ainsi réalisé une douzaine de films documentaires depuis 1980.
Dans son roman «Zaïda», paru en allemand au début de l’année, Anne Cuneo entrelace des éléments personnels avec des biographies réelles. Zaïda est une aïeule de cent ans s’attellant à la rédaction de l’histoire de sa vie pour sa petite fille qui vient de naître.
Et c’est une vie qui mérite d’être racontée: née en 1859 dans une famille anglaise aisée, Zaïda souffre très tôt de l’éducation maternelle, froide et sévère. Elle profite de la première occasion pour briser le corset des conventions et part étudier la médecine à Zürich. Malgré les préjugés, elle exercera sa profession, en Angleterre d’abord, puis en Italie. Les histoires de vie, d’amour et de souffrances de cette femme aux épaules solides dressent, au-delà de la biographie, le portrait des bouleversements sociaux et politiques qui ont marqués des générations et dont les répercussions se font encore sentir aujourd’hui.

Zaïda. Orbe: Bernard Campiche Editeur 2007
Hôtel des coeurs brisés. Orbe: Bernard Campiche Editeur 2004
Le Sourire de Lisa. Orbe: Bernard Campiche Editeur 2000.

Traductions allemandes parues à ce jour:
Zaïda. Roman. Übers. Erich Liebi. Limmat Verlag, Bilgerverlag 2009
Hotel Herzschlag. Übers. Erich Liebi. Limmat Verlag 2004
Lisas Lächeln. Übers. Erich Liebi. Limmat Verlag 2003
(Originalausgabe 2000)

GYÖRGY DRAGOMAN

György Dragomán fut la découverte littéraire de l’automne dernier. Son roman «Der weisse König» («Le Roi blanc»), déjà traduit en quinze langues, a suscité l’enthousiasme des critiques autant que des lecteurs.
Dans son deuxième roman, György Dragoman soumet une société malade au regard naïf d’un enfant de onze ans. À travers dix-huit scènes, le garçon décrit les événements qui ont bouleversé sa vie. L’arrestation de son père par des étrangers en uniforme et sa déportation dans un camp de travail, le licenciement de sa mère – enseignante jusqu’alors, traitée soudain de «dissidente» et de «pute juive» – et les injures dont il est lui aussi victime, exposé à l’école comme dans la rue à la vexation et à l’intimidation de «ceux qui savent». «Le Roi blanc» raconte l’histoire d’une enfance roumaine dans les années quatre-vingt sous la pression d’un régime communiste totalitaire.
Impétueuse, l’écriture de György Dragoman expose avec une intensité émotive et menaçante la violence, la trahison, la brutalité, le cynisme, la corruption, le chantage, la peur et le désespoir.
Au-delà de ce sombre scénario de débâcle d’un monde, l’auteur sait faire apparaître dans le charme de la langue du narrateur (composée de longues phrases qui entraînent parfois le lecteur sur plusieurs pages) une lueur d’espoir, peut-être même une lumière au bout du tunnel.
György Dragomán est né en 1973 dans une ville roumaine de Transylvanie centrale. Appartenant à une minorité hongroise, il émigre avec ses parents à Budapest en 1988 et vit depuis maintenant vingt ans en Hongrie. En plus de son activité d’écrivain il a traduit en hongrois des classiques comme Beckett et Joyce ainsi que de la littérature anglaise contemporaine.

Der weisse König. Roman. Suhrkamp Verlag 2008

Traductions françaises parues à ce jour:
Le Roi blanc. trad. par Joëlle Dufeuilly.
Gallimard, collection Du monde entier 2009

DANIEL GOETSCH

Né en 1968 à Zürich, Daniel Goetsch a grandi à Windisch et Nussbaumen dans le canton d’Argovie. Dès la fin de ses – brillantes – études de droit à Zurich et à Toulouse, en 1995, il s’impose dans le milieu littéraire. Il vit aujourd’hui à Berlin, et écrit aussi bien des romans que des nouvelles et des pièces de théâtre et radiophoniques. Son dernier roman Herz aus Sand (Coeur de Sable) tourne autour de Frank, observateur dans un camp de réfugiés à l’ouest du Sahara. Il a laissé derrière lui sa thèse en droit théorique et son grand amour, décidé à faire «quelque chose de bien»... Mais ses souvenirs refont surface lorsqu’apparaît Duncker, architecte aux grands projets. Un jour, Duncker est retrouvé mort. Suicide ou meurtre ? Cela joue-t-il seulement un rôle dans la réalité de la vie du camp?
À travers le rythme tranquille du «coeur de sable», dans la nonchalance éloquente de son écriture, Daniel Goetsch parvient à saisir le désespoir silencieux de ses personnages et la monotonie de leurs existences.
A son propos l’Aargauer Zeitung déclarait: «Un livre qui chavire et éclaire. Le roman de Daniel Goetsch se situe bien loin d’un tourisme romantique du désert, et touche au coeur le monde globalisé.»

Herz aus Sand. Roman. Bilgerverlag 2009
Ben Kader. Roman. Bilgerverlag 2006
X. Roman. Bilgerverlag 2004

Judith Hermann

Diplômée en journalisme, c’est finalement l’écriture littéraire et tout particulièrement la nouvelle qui a convaincu Judith Hermann. Née en 1970, la berlinoise fut dès son premier livre acclamée par la critique – littéralement portée aux nues, louée «à mort» comme elle se plaît parfois à le dire. Paru en 1998, ce premier recueil de nouvelle, «Sommerhaus, später» (Maison d’été, plus tard) - déjà traduit en 17 langues – fit véritablement souffler un vent revigorant sur l’ensemble des productions germanophones contemporaines. Après ce succès, il lui fallut cependant apprendre à composer avec la pression exercée par l’éditeur, les médias et la toute nouvelle renommée publique.
Avec son deuxième recueil paru en 2003, «Nichts als Gespenster» (Rien que des fantômes), Judith Hermann confirmait son talent pour le genre. Après un nouveau laps de cinq ans, la romancière réitère l’expérience avec «Alice», un récit composé de cinq nouvelles entremêlées. Le lien entre toutes: la mort abordée du côté des vivants représentés par Alice, la principale protagoniste. Enthousiaste, un journaliste de la NZZ déclarait à propos de Judith Hermann que tout l’art de l’écrivaine consistait à introduire de la légèreté dans l’accablant, à laisser le définitif en suspension. Dégageant le texte des entraves et lourdeurs, elle évoque humblement et sans sensiblerie la mort et la détresse de «celui qui reste». Certains éléments sont consciemment tus, pour atteindre une profondeur épurée, proche du poétique.
L’auteure vit actuellement à Berlin-Prenzlauerberg avec son fils.

Alice. S. Fischer Verlag, 2009
Nicht als Gespenster. S. Fischer Verlag, 2003
Sommerhaus, später. S. Fischer Verlag, 1998

Traductions françaises parues à ce jour:
Rien que des fantômes. Trad. par Dominique Autrand.
Albin Michel 2005
Maison d'été, plus tard. Trad. par Dominique Autrand.
Albin Michel 2001

ANNA KIM

On entend trop souvent les critiques littéraires se plaindre que les jeunes auteurs ont peu de chose à raconter, que leurs héros sont de semi-intellectuels ennuyeux, inexpérimentés et cyniques, ignorants de la vraie vie, bref qu’ils n’ont rien à dire à leurs lecteurs. Pourtant, avec son deuxième livre «Die gefrorene Zeit» («Le temps gelé») Anna Kim prouve le contraire. Elle y raconte l’histoire d’un kosovar à la recherche de sa femme disparue et l’intrusion progressive dans sa vie de la narratrice, Nora, collaboratrice au service de recherche de la Croix-rouge. Petit à petit, celle-ci fait connaissance avec le quotidien des zones de conflits entre serbes et albanais et perçoit les rapports complexes dissimulés derrière les événements tragiques et traumatisants de la guerre. Elle découvre aussi le travail choquant des archéologues, médecins légistes et anthropologues. C’est alors une dimension du souvenir et de sa fragilité qui s’ouvre à nous, faites de biographies interrompues et d’un «temps gelé».
Pour préparer son livre, Anna Kim est partie d’un catalogue de photos d’objets trouvés dans les fosses communes: passeports, vêtements épars, petites choses que l’on trimballe dans sa poche... Ces images, déclare-t-elle, lui ont permis de saisir la signification d’un traumatisme de guerre à un niveau individuel. A travers des échanges avec des ressortissants du Kosovo qui lui ont fait part de la tristesse de leurs deuils, la jeune auteure a également découvert l’existence de la frontière à partir de laquelle il n’est plus possible de questionner, de parler. Un des enjeux fondamental de son écriture fut de surmonter cette frontière afin d’arriver, malgré tout, à la prochaine phrase.
Avec son nouveau livre, Anna Kim nous offre ainsi un texte poignant, dans lequel elle a su déployer une langue juste, pour décrire aussi bien les horreurs de la guerre que les menues joies et inquiétudes du quotidien.

Die gefrorene Zeit. Roman. Droschl Verlag 2008
Die Bilderspur. Eine Künstlernovelle. Droschl Verlag 2004

TERÉZIA MORA

Née en 1971 en Hongrie, Terézia Mora vit depuis 1990 à Berlin. Après des études en philologie hongroise et en dramaturgie, elle entame une formation de scénariste. Depuis 1998, elle est écrivaine indépendante et a traduit en allemand de nombreux auteurs hongrois, parmi lesquels Péter Esterhazy, Lajos Parti Nagy et Istvan Örkény. Interrogée à propos de ses trop rares créations en tant que scénariste, elle répondait au magazine mensuel «Literaturkritik» qu’elle n’avait pas voulu se concentrer sur la quantité. Son unique film policier avait été regardé par six millions de téléspectateurs – elle n’atteindrait certes jamais ce chiffre avec sa prose, mais elle atteindrait autre chose.
Pour ses romans et nouvelles, l’auteure s’est vu décerner de nombreuses récompenses: le prix Ingeborg-Bachmann en 1999, et le prix du salon du livre de Leipzig en 2005, pour ne citer que ceux-là. L’œuvre de Terézia Mora traite de manière récurrente de la question de l’état du monde. La critique littéraire Verena Auffermann décrivait «Alle Tage» (Tous les jours), roman paru en 2004, comme un livre avec et sans divin à propos d’amour et d’amour de la langue. Un livre empli de savoir, d’allusions, de questions. De mise à distance aussi, de perspective décalée et d’ironie. «Une belle performance», concluait-elle.
Déjà présente en 2000 et 2005, Terézia Mora voyage cette année pour la troisième fois au Festival de littérature de Loèche-les-Bains. Une fois encore elle amène dans ses bagages un prodigieux roman: «Der einzige Mann auf dem Kontinent» (Le Seul homme sur le continent). Selon l’auteure, il s’agirait à nouveau d’une expérience colossale, telle que «Alle Tage», sur l’Univers et sur tout le Reste...

Der einzige Mann auf dem Kontinent. Roman.
Luchterhand August 2009
Alle Tage. Roman. Luchterhand 2004
Seltsame Materie. Nouvelles. Luchterhand 1999

Traductions françaises parues à ce jour:
Étrange matière. trad. par Monique Rival.
L'Esprit des péninsules 2002

HERTA MÜLLER

Herta Müller est née en 1953 dans le village germanophone de Nitzky en Roumanie. Après des études de philologie allemande et roumaine elle travaille comme traductrice. Congédiée parce qu’elle refusait de travailler pour les services secrets roumains, elle sera sans cesse interpellée et menacée, ses livres seront censurés puis interdits en Roumanie. En 1987, Herta Müller émigre en Allemagne où elle vit aujourd’hui à Berlin. Entre 1989 et 2001 elle occupe différents postes de professeure invitée en Angleterre, Etats-Unis, Suisse et Allemagne. Depuis 1995 l’auteure est membre de L’Académie allemande pour la Langue et la Littérature.
L’expérience littéraire d’Herta Müller est un rare exemple de diversité. Elle écrit des essais pointus, traite avec brio des questions linguistiques, compose des romans incomparables et pimente ses poèmes en leur donnant parfois la forme naïve du collage – transformant le lecteur critique en observateur fasciné et l’observateur sceptique en lecteur enthousiaste. Herta Müller suscite l’admiration non seulement par son style langagier inventif, mais aussi à travers la composition de ses personnages originaux à la limite de la caricature et les scènes simples qu’elle retrace de sa plume habile.
Au festival de littérature de Loèche-les-Bains, Herta Müller présentera en premier lieu une recherche coécrite avec le poète germano-roumain Oskar Pastior, décédé en 2006. Sous le titre de travail «Atemschaukel», les auteurs se sont penchés sur la déportation des Roumains d’origine allemande en Union soviétique entre 1945 et 1950.

Atemschaukel (titre de travail).
Der Fuchs war damals schon der Jäger.
Roman. Hanser. Neuauflage 2009
Die blassen Herren mit den Mokkatassen. Gedichte. Hanser 2005
Der König verneigt sich und tötet. Hanser 2003

Traductions françaises parues à ce jour:
La convocation. trad. par Claire de Oliveira, Editions Métailié 2001
Le renard était déjà le chasseur. trad. par Nicole Bary, Seuil 1997
L'homme est un grand faisan sur terre. trad. par Nicole Bary,
Gallimard Folio, 1990

VÉRONIQUE OLMI

Véronique Olmi est née en 1962 à Nice, et vit aujourd’hui à Paris avec ses deux enfants. Dramaturge et écrivaine, elle a remporté de nombreux prix. Cette comédienne de formation a écrit douze pièces de théâtre depuis 1990. Lors de leurs représentations, elle est souvent montée elle-même sur les planches, quand elle ne s’occupait pas de la mise en scène. Ses pièces sont traduites en de nombreuses langues, dont l’allemand, et ont beaucoup été représentées en Allemagne, Autriche ou Suisse allemande.
Dans un style clair et sec qui ne se perd pas dans les détails, Véronique Olmi évoque les zones d’ombres d’une apparente normalité. Et c’est justement à travers les ombres de son écriture pénétrante, les non-dits, qu’elle parvient à captiver le lecteur.
L’hebdomadaire «Die Zeit» déclarait à son propos qu’elle était une digne descendante des moralistes français, tout occupée à sonder la commune tentation de transformer la vie en scène pour se réfugier dans le rôle qui nous est proposé.
L’année dernière déjà, Véronique Olmi était invitée au Festival de Loèche-les-Bains. Elle avait cependant dû annuler sa participation au dernier moment. Nous nous réjouissons donc de pouvoir enfin l’accueillir cette année, accompagnée de son dernier roman «La Promenade des Russes» – tout juste paru en allemand sous le titre Die Promenade.

La Promenade des russes. Grasset 2008

Die Promenade. trad. par Claudia Steinitz. Kunstmann 2009
Ihre Leidenschaft. trad. par Claudia Steinitz. Kunstmann 2007
Ein Mann, eine Frau. trad. par Claudia Steinitz. Kunstmann 2006
Meeresrand. trad. par R. Nentwig. Roman. Kunstmann 2006
Eine so schöne Zukunft. trad. par Claudia Steinitz. Kunstmann 2004
Nummer sechs. trad. par Sigrid Vagt. Kunstmann 2003
Der Riss. Letzter Sommer. Magali. trad. par Katharina von Bismarck, Rudolf Rach et Frank Heibert, Gerda Scheffel et Tobias Scheffel. Suhrkamp Verlag 2002

JOACHIM SARTORIUS

Joachim Sartorius est poète, essayiste et éditeur des oeuvres complètes de Malcolm Lowry et William Carlos Williams. Il a traduit, entre autres auteurs, John Ashbery, Wallace Stevens et E.E. Cummings, et il a également publié deux anthologies, «Atlas der neuen Poesie» (1995) et «Minima Poetica» (1999). Pendant vingt ans, il a travaillé comme diplomate à New-York, Istanbul, Prague et Chypre, avant de devenir secrétaire générale du Goethe-Institut. Il dirige aujourd’hui le Festival de Berlin.
Joachim Sartorius occupe une place de choix au carrefour des cultures tant comme médiateur poétique que comme poète. Les voyages à travers les continents, les cultures et les époques, les rencontres et les lectures abreuvent son œuvre, démontrant que la poésie n’est pas exclusivement une affaire européenne. Il relie de manière unique l’image et la langue de l’individu avec l’universalité du monde. Dans ses travaux sur la poésie, il réfute l’idée qu’il puisse y avoir une poésie mondiale, une poétique mondialisée ou même un «musée de la poésie moderne».
«Ce que les nombreuses langues et poésies étrangères démontrent d’une manière merveilleusement incontestable, déclare-t-il, c’est l’incroyable différence de toute chose. La richesse de chaque poème est distincte et étrangère et ne peut être là qu’à sa manière.»
On retrouve dans son nouveau recueil de poèmes, «Hôtel des Étrangers», les grands thèmes de son œuvre: la volupté et l’évanescence, l’amour corporel et sa grande sœur: la mort. Les «villes de l’Est» sont des lieux étranges, des passages franchissant la frontière d’une topographie intime. Elles conduisent sur le terrain glissant et pourtant exquis des métaphores. Le voyage, le souvenir intense et douloureux et la méditation sont autant de variations du travail d’écriture de Joachim Sartorius. Elles donnent toutes, à leur manière, une réponse à la question du lieu ouvert par le poème.

Die Prinzeninseln. Ein Reisebuch. mareverlag 2009
Hôtel des Étrangers. Gedichte. Kiepenheuer&Witsch Verlag 2008
Das Innere der Schiffe. Zwischen Wort und Bild. DuMont Verlag 2006

Traductions françaises parues à ce jour:
Des ombres sous les vagues.
trad. par Françoise David-Schaumann et Joël Vincent, Grèges 2005
A Tunis, les palmiers sont menteurs.
trad. par Françoise David-Schaumann et Joël Vincent,
Atelier La Feugraie 2007

DANIEL SCHWARTZ

Né en 1955, Daniel Schwartz vit actuellement à Zurich. Photographe internationalement connu, et collaborateur de longue date du magazine culturel suisse Du, il a souvent été exposé en Suisse et ailleurs. L’automne dernier, Schwartz publiait un livre éblouissant de plus de mille pages, «Schnee in Samarkand. Ein Reisebericht aus dreitausend Jahren.» («Neige à Samarcande, Un récit de voyage en 3000 ans»). Innovant, ce livre tente une périlleuse entreprise jamais envisagée sous cette forme: un voyage dans l’espace et dans le temps. Une fois de plus, le photographe est parti à l’aventure pour déceler le présent dans le passé et saisir le regard des chinois, des perses, des arabes et des européens sur leurs étrangers respectifs.
Le résultat, un mélange de récits de voyage, de reportages politiques, de livres d’histoire et d’histoire culturelle, dépasse tout ce qui a été écrit dans le genre, des productions de Paul Theroux à celles de Cees Nooteboom et V.S. Naipaul, en passant par celles de Ryszard Kapuscinski.
En 1987, Schwartz a été le premier étranger à remonter la muraille de Chine dans toute sa longueur. Dès lors, cette frontière infinie, décor millénaire des guerres et batailles des plus grandes cultures du monde, ne l’a plus quitté. Il décrit à travers son histoire en images les existences précaires et la constante insécurité existentielle... Il éclaire de manière poignante les irrégularités entre les cultures. Et les malentendus traditionnels (découlant du développement des puissances politiques après le onze septembre) deviennent en arrière fond de la guerre jour après jour plus visibles et plus frappants.
«Travelling through the eye of history», une exposition conçue par Daniel Schwartz et Simone Maurer a pu être visitée au printemps 2009 à l’Helmhaus de Zurich et sera visible de juin à octobre 2010 au Martin-Gropius-Bau de Berlin. Le catalogue de l’exposition, contenant 165 photographies est paru chez Thames & Hudson (London, 2009).

Schnee in Samarkand.
Ein Reisebericht aus dreitausend Jahren. Eichborn 2008
Geschichten von der Globalisierung.
Daniel Schwartz (Hrsg.). Steidl Verlag 2003

Traductions françaises parues à ce jour:
Récits d’une mondialisation.
Daniel Schwartz (dir.). Thames & Hudson 2003
La grande muraille de Chine Thames and Hudson 2001.
(Photographies de D. Schwartz avec des textes de Jorge Luis Borges, Franz Kafka et Luo Zhewen)

ALEŠ ŠTEGER

Poète, essayiste et traducteur, Aleš Štegers est né en 1973 à Ptuj (Slovénie) dans une région que Peter Handke décrivait volontiers comme un monde originel, magique et envoûtant.
Dans ses textes les mots, sans cesse placés dans un équilibre précaire, s’éclairent les uns les autres au gré du rythme. Il suffit souvent d’une courte impulsion, d’un revirement: et déjà les vers sont recomposés, à réinterpréter. La forme des poèmes d’Aleš Šteger adopte parfaitement le mouvement de la pensée, et tout son art est d’arriver à surprendre son lecteur en superposant des images volages et incongrues aux représentations immédiates de l’esprit. On finit par ne plus savoir ce qui se trouvait là en premier du mot «Kater» (chat) ou de l’image évoquée par l’auteur de «kastrierten Travestit im Nerz» (travesti castré de ses visions). Par ne plus savoir si un trombone ressemble vraiment à un trombone, s’il ne gît pas plutôt là «comme un fœtus / comme un escargot, comme un corps dans une fosse commune». Lorsque l’on écoute la voix douce et lente d’Aleš Šteger faire la lecture de ses textes, s’y plongeant tout entier, on se surprend à croire une fois encore au pouvoir de métamorphose de la poésie.
Le dernier livre de Šteger, «Preußenpark. Berliner Skizzen» («Parc prusse. Esquisses berlinoises») nous convie à une promenade dans un Berlin poétique. Dans ces trente poèmes et essais lyriques miniatures, l’auteur a consigné ce qu’il a pu voir et entendre dans cette ville. Chargés de signification, de souvenirs, emplis des voix de ceux qui ont précédé, ces textes transforment l’inconnu en perception sensorielle et féconde, insufflée avec talent et intelligence à travers les mots du poète.

Preußenpark. Berliner Skizzen. Essays. Suhrkamp 2009
Buch der Dinge. Gedichte. Suhrkamp 2006
Zu zweit nirgendwo. édité par Aleš Šteger.
Neue Erzählungen aus Slowenien. Suhrkamp 2006

BENEDICT WELLS

Benedict Wells est né en 1984 à Munich. Après avoir obtenu son baccalauréat il se rend à Berlin pour réaliser son rêve de toujours: devenir écrivain. Ce qui ressemblait fort à un rêve d’adolescent présageant un réveil douloureux devient pour lui réalité.
C’est justement d’un rêve de jeunesse dont il est question dans «Becks letzter Sommer» (Le dernier été de Beck), le premier roman de Wells. Robert Beck, le personnage principal, a abandonné son ambition de jeunesse d’entreprendre une carrière musicale. Il est devenu enseignant de second cycle, aigri et amer, lorsque l’occasion de donner un nouveau cap à sa vie se présente à lui. Son nouvel élève, Rauli, se révèle musicien génial, et Beck se voit déjà agent. C’est alors un délicieux plaisir pour le lecteur que de suivre Beck et ses compagnons dans ce nouveau départ. L’auteur emporte l’élève et le maître – le virtuose et l’agent – en voiture, direction Istanbul. Accompagné de Charlie, un musicien de l’ancien groupe de Beck, le duo va vivre quelques aventures, naturellement parsemées d’amour.
Mais le livre de Benedict Wells est bien plus qu’un roadmovie à l’écriture bien rodée. L’auteur se plaît à surprendre son lecteur: à chaque fois que celui-ci croit savoir où Charlie, Beck et Rauli vont atterrir, un événement imprévu vient le détromper. Et puis il y a Ben, l’alter ego de l’auteur, qui apparaît de page en page, entraînant le lecteur à la recherche d’une fin adéquate.
A 24 ans, Benedict Wells est le plus jeune auteur de la maison d’édition Diogenes. Le plus réjouissant en ce qui le concerne est sans doute qu’il a écrit deux livres simultanément et qu’il travaille actuellement à son troisième. La relève est donc assurée...

Becks letzter Sommer. Roman. Diogenes 2008
Spinner. Roman. Diogenes (à paraître en août 2009)

Andrea Winkler

L’auteure fait partie des voix les plus intéressantes et les plus singulières de la littérature autrichienne contemporaine. Langue et contenu s’accorde dans son œuvre pour former une texture poétique abordant avec souplesse des questions existentielles de souvenir et d’oubli. Son premier livre déjà, «Arme Närrchen», dévoilait un ton très personnel au style admirablement assuré. On retrouve cette même maîtrise dans «Hanna und ich» (Hanna et moi), le deuxième roman de l’autrichienne. Certains livres racontent une histoire, d’autres en recherche. Les romans d’Andrea Winkler font partie de cette deuxième catégorie. Ils n’en sont pas moins passionnants, mais le cheminement de l’auteur et du lecteur en est rendu plus ardu.
Sa singularité d’écriture distingue Andrea Winkler de la majorité des œuvres littéraires de cette année. Dans «Hanna und ich», elle met en scène des personnages «sur lesquels on ne peut pas compter»: Hanna, Rio, Lea, Monsieur Emm et la voix narratrice. Cinq acteurs qui se refusent à un abord claire et facile. On croit les reconnaître grâce à leurs gestes et à certaines formulations récurrentes, mais ces caractéristiques mêmes permutent parfois entre eux. Se mettent alors en place des variations scéniques et des changements de point de vue, dont la composition et l’arrangement sont organisés selon un canevas rigoureux. Ce n’est donc pas au nom d’une quelconque idéologie qu’Andrea Winkler rejette tout schéma narratif traditionnel, mais bel et bien en réponse à l’expérience fondamentale des relations bouleversées, altérées, qui échappent sans cesse à l’individu en quête de repères – dans la vie comme dans le texte.

Hanna und ich. Droschl Verlag 2008
Arme Närrchen. Selbstgespräche. Droschl Verlag 2006

Pascale Kramer

Dans ses romans, Pascale Kramer investit l’univers du couple d’amoureux s’enlisant dans la routine et la médiocrité, prisonnier d’une subtile violence. Les premiers textes de la romancière, déjà, dégageaient un malaise déconcertant. Emanant d’abord de l’atmosphère particulière des lieux – des maisons délabrées, des rues poussiéreuses, de l’air lourd et fétide. Pascale Kramer évoque l’insupportable vanité de l’existence dans un style précis et convaincant, à moyenne distance du romantisme et de la télé-réalité. Les moindres détails sont observés, leurs pistes retracées jusqu’à leurs significations ancestrales. L’invisible est dévoilé – moins par les mots, dont les personnages sont avares, que par les gestes traîtres. L’auteure guette ces derniers, attentive aux changements d’humeur brusques, au vent qui fait tourner les relations entre des êtres trop fragiles pour y résister.
Dans son dernier roman publié en allemand, Pascale Kramer figure en images sensibles un amour consumé. Dans une atmosphère sensuellement chargée de colère, de désespoir et de détresse, elle raconte l’histoire tragique d’une relation condamnée à l’échec. «L’Adieu au Nord» balance ainsi entre douloureuse extase et rude tendresse.

L'implacable brutalité du réveil. Editions Mercure de France 2009
Fracas. Mercure de France 2007
Retour d'Uruguay. Mercure de France 2003
L'adieu au Nord. Mercure de France 2005
Les Vivants. Calmann-Lévy 2000

Traductions allemandes parues à ce jour:
Abschied vom Norden. Übers. von Andrea Spingler.
Arche Verlag, 2007
Zurück. Übers. von Andrea Spingler. Arche Verlag 2004
Die Lebenden. Übers. von Andrea Spingler. Arche Verlag 2003

Sibylle Lewitscharoff

Déjà présente en 2000 et 2003, la romancière est invitée cette année pour la troisième fois au Festival de littérature de Loèche-les-Bains. Née en 1954 à Stuttgart, Sibylle Lewitscharoff est lauréate du prix littéraire de Loèche-les-Bains, le Spycher 2009. Elle présentera au Festival son dernier livre, «Apostoloff», également distingué au Salon du livre de Leipzig. Après des études en sciences des religions, elle travaille aujourd’hui comme comptable dans une agence de publicité à Berlin. Son activité littéraire débute à la radio, pour laquelle elle crée des programmes et compose des pièces radiophoniques. En 1998, elle reçoit le prix Ingeborg-Bachmann pour son roman «Pong»: c’est le début d’une carrière. Dans ses compositions, l’auteure fait preuve d’une rare diversité et d’un sens de l’humour à toute épreuve.
Avec «Apostoloff», Sibylle Lewitscharoff renoue avec ses racines paternelles d’origine bulgare. Deux soeurs font le chemin de Stuttgart à Degerloch pour rapatrier le corps de leur père en Bulgarie. Leur chauffeur, Rumen Apostoloff, tente en vain de les initier à la beauté du pays. Affichant une franche mauvaise foi, la narratrice ne voit que les conséquences désastreuses des suites du communisme sur les villes abîmées, les villages et les habitants. Depuis le siège arrière de la voiture, elle maugrée, agrémentant ses commentaires de remarques délicieusement acerbes. Sibylle Lewitscharoff ne parle pas un mot de bulgare ; le roman est dédicacé à son cousin, qui lui a servi d’interprète dans le périple qu’elle a elle-même entrepris, devançant ses personnages. A travers un subtil humour teinté d’ironie, l’auteure interroge remarquablement les concepts d’origine, de nation et de patrie. Elle aspire, constatait Tilman Krause dans le quotidien Die Welt, à dépasser les étroitesses d’esprit qu’ils impliquent.
Le «Spycher: prix littéraire de Loèche 2009» sera remis fin août à Sibylle Lewitscharoff. Vous trouverez des informations complémentaires dans l’article Spycher.

Apostoloff. Roman. Suhrkamp 2009
Consommatus. Roman. DVA 2006
Montgomery. Roman. DVA 2003
Der höfliche Harald. Berlin Verlag 1999

Traductions françaises parues à ce jour:
Harald le courtois. Trad. par Anne Weber. Seuil 2002

Hugo Loetscher

Conteur fabuleux et libertin, spirituel causeur en même temps que sceptique du langage, Hugo Loetscher a incontestablement marqué la vie intellectuelle suisse. Penseur insatiable et infatigable voyageur – il est sans aucun doute le plus baroudeur des écrivains suisses. Il se sent pareillement chez lui sur le bord de la Limmat qu’en Amazonie, et voyage pour mieux revenir à Zurich. Ses livres sont imprégnés de cette alternance de l’étranger et du familier.
Hugo Loetscher, qui fêtera cette année ses 80 ans, n’a jamais différencié la littérature et le journalisme, la culture et la politique. Il outrepasse littéralement les frontières. Ce cosmopolite incarne à la perfection ce que beaucoup considèrent encore d’un œil dubitatif : la Suisse dans le monde et le monde dans la Suisse. Il donne véritablement forme à la globalisation culturelle. Grand voyageur, Hugo Loetscher parvient à travers ses textes à nous faire découvrir, à chaque fois différemment, la Suisse et les rapports qu’elle entretient avec le monde.
Présent pour la deuxième fois au Festival, l’intellectuel présentera son nouveau roman à paraître à l’automne. Il conduira en outre avec le photographe de renommée internationale Daniel Schwartz une discussion autour du voyage et de la photographie.
«Die heile Welt zu Hause war nie so heil, wie wir meinten und es uns lieb gewesen wäre. Und am Unheil der Welt partizipierten wir längst, ob wir mochten oder nicht. Dass solche Erkenntnis sichtbar wurde, ist ein Verdienst der Fotografen.»
«Notre monde n’a jamais été aussi sain que nous le pensions et que nous l’aurions souhaité. Et nous participons depuis longtemps à la dégradation du monde, que nous le voulions ou non. C’est grâce au travail des photographes que cette vérité nous a été dévoilée.» (Hugo Loetscher)

War meine Zeit meine Zeit. Roman.
Diogenes 2009 (à paraître en août 2009)
Es war einmal die Welt. Gedichte. Diogenes 2004
Lesen statt klettern. Aufsätze. Diogenes 2003

Traductions françaises parues à ce jour:
Saison. Trad. par Dominique Kugler, Fayard, 1997
Le coq prêcheur: de l’utilisation littéraire et morale des animaux. Trad. par Jean-Claude Capèle. Fayard 1994
La mouche et la soupe et 33 autres animaux dans 33 autres situations. Trad. par Jean-Claude Capèle. Fayard 1995

Christine Pfammatter

Christine Pfammater est née en 1969 à Loèche-ville et vit aujourd’hui en tant qu’écrivaine à Berlin. Elle a étudié la philosophie, la littérature et l’histoire de l’art à Bern et à Fribourg, et a vécu quelques temps à Paris et à New York.
Après plusieurs publications dans diverses revues littéraires, telles que Manuskripte, Entwürfe, ndl, Nord-Süd-Passage ainsi que dans l’anthologie «Natürlich die Schweizer!» (Naturellement, les Suisses!) éditée par Reto Sorg, son premier recueil de nouvelles «Zuviel Sonne», (Trop de soleil) est paru en 2008. Un livre estimé «malicieux, critique, passionnant, singulier et amusant» par les Stuttgarter Nachrichten, les nouvelles de Stuttgart.
Plus qu’à un recueil de nouvelles, «Zuviel Sonne» correspond à une collection de textes miniatures, dans lesquels Christine Pfammatter transforme en littérature d’incidentes observations de la vie urbaine. Car Christine Pfammatter n’invente pas ses histoires, elle les trouve. Dans la rue, en elle-même, chez les gens qu’elle rencontre de jour en jour. Sa langue est simple et sobre, plutôt brève.
«Christine Pfammatter écrit comme on parle du beau temps. (...) Mais l’écriture ne peut pas aller à l’encontre des vents et des aveuglements du quotidien, elle ne peut pas les amplifier ou les réduire, elle doit les accepter telles qu’ils sont, les intégrer et les raconter à nouveau, afin que l’apparemment connu, le banal et le profane surprennent et fascinent.» (Reto Sorg à propos de «Zuviel Sonne».)
L’auteure travaille depuis avril 2009 et pour six mois dans une résidence d’artiste à Chretzeturm in Stein, dans le canton de Schaffhouse, au bord du Rhin.

Zuviel Sonne. Erzählungen. Erata Literaturverlag 2008
Natürlich die Schweizer. Herausgegeben von Reto Sorg.
Mit einem Beitrag von Christine Pfammater. Aufbau Taschenbuch 2002

Verena Rossbacher

Née en 1979, Verena Rossbacher vient d’achever un fantastique premier roman, «Verlangen nach Drachen» – un titre imagé qui pourrait être traduit par «Un désir de dragons». La jeune auteure y aborde la délicate question de l’oubli, dont le processus apparemment simple peut se révéler le plus difficile qu’il soit. Elle y traite de la coupure nécessaire mais irréalisable, de la très banale et cependant inacceptable extinction des sentiments. Et celui qui rejettera la banalité ressentira tout naturellement un «désir de dragons». Cet épais roman polyphonique nous entraîne dans un monde de métamorphoses, de souvenirs et d’errances, dans un monde de liaisons et de troubles. Il est un magnifique mélange de burlesque et de sage, de fantastique et de sérieux.
Le roman de Verena Rossbacher est composé de récits d’échec. Les sept chapitres tournent autour de Klara et de ses hommes, et à chaque histoire un autre homme est placé sous les projecteurs. Tour à tour sont évoqués l’éclosion d’un penchant qu’on dirait amoureux et son épuisement, la passion des premiers instants et le désenchantement qui les suit. Excentriques, fous, passionnés, ils le sont tous un peu, ces hommes qui courtisent Klara et qui espèrent trouver le Bonheur quelque part entre l’originel et le génial, la nature et la musique...
A coup d’enchâssements et d’inversions, la jeune femme confère à ses phrases une mélodie d’un autre temps. Elle crée ainsi une atmosphère brumeuse, rendant merveilleusement sensible le singulier égarement de ses personnages.

Verlangen nach Drachen. Roman. Kiepenheuer & Witsch. 2009

Jochen Schmidt

Né en 1970 à Berlin, Jochen Schmidt fait partie du noyau dur de la scène de lecture berlinoise «Chaussee der Enthusiasten», à la création de laquelle il participa en 1999. Ses narrateurs, composés pour une bonne moitié d’éléments réels de ses propres vie et personnalité, traînent une vie errante et vacillante sans même sans même en avoir conscience.
En juillet 2006, Jochen Schmidt, commençait à lire chaque jour vingt pages de la «Recherche du temps perdu» de Marcel Proust et publiait ses réflexions et ses expériences de lecture sur un blog internet. L’intérêt consistait en la confrontation de deux mondes: celui du lecteur d’aujourd’hui et celui de l’écrivain d’hier. Ce singulier projet littéraire se déploya rapidement sur deux voies parallèles. D’un côté des considérations sur la vie de Schmidt pendant la période de lecture – sur sa vie quotidiennes, son travail, ses voyages –, de l’autre, comme en miroir des premières, des considérations sur le roman lu, intelligemment interprété, cité et commenté. Bien vite les perceptions quotidiennes de l’écrivain sont influencées par sa lecture de Proust. Il est entre autre question d’est et d’ouest, du rapport de la Stasi sur sa mère, d’appareils ménagers cassés, d’un ordinateur récalcitrant, de petites vexations potentielles au contact d’autres hommes.
Jochen Schmidt a en outre la capacité d’esquisser en très peu de phrases le portrait de personnages bouffons ou de représenter une situation absurde. Son écriture a quelque chose de frais dans la description du parcours de son héros vers l’âge adulte, (un parcours qui s’étend un peu plus longtemps que prévu); il y a quelque chose de neuf dans ses dissertations sur la fantaisie et la philosophie présentes dans le quotidien ou encore sur les fonctions de son propre corps. Avec un flair bien formé pour le pathologique, Jochen Schmidt explore aussi les zones d’ombre du corps.

Schmidt liest Proust. Voland & Quist Verlag 2009
Meine wichtigsten Körperfunktionen. C.H. Beck Verlag 2007
Müller haut uns raus. Roman. C.H. Beck Verlag 2002

John Wray

Né à Washington en 1971 d’un père américain et d’une mère autrichienne, John Wray publie son troisième roman, paru simultanément aux Etats-Unis et en Allemagne, chez Rowohlt. Nul doute pour les initiés qu’il jouera bientôt un rôle prééminent sur la scène littéraire nord américaine.
«Retter der Welt» («Lowboy», en anglais) livre le portrait oppressant et authentique d’un jeune schizophrène, évadé de l’institution psychiatrique. John Wray réussit ici un roman saisissant et claustrophobe autour de notre peut-être pas si raisonnable réalité. Un thriller psychologique filant à toute vitesse vers une fin captivante, tel un train sans conducteur à travers l’empire des ombres du métro new-yorkais. Une fuite désespérée dans le réseau souterrain, royaume de ténèbres, de saleté, de chaleur et de bruit. John Wray crée la tension, suscite l’attention, sans jamais verser dans la compassion au sens traditionnel du terme – car son protagoniste n’est pas une victime. Une idée insensée entraîne l’adolescent dans cette course folle: il est l’élu chargé de sauver le monde du proche désastre climatique. Lui seul a pu lire les signes, lui seul est capable d’assurer la survie du monde, car ce dernier est en lui. Pour cela, il en est convaincu, il doit s’épanouir dans une unique, une grande, une ardente relation sexuelle. Une perspective qui lui semble bien répugnante, mais qui est la seule manière de tempérer la chaleur de son propre corps, afin d’équilibrer celle de l’atmosphère.

Retter der Welt. Roman. Rowohlt Verlag 2009
Die rechte Hand des Schlafes. Roman. Berlin Verlag 2002

Notice nécrologique pour Gert Jonke

Né en 1946 à Klagenfurt; décédé le 4 janvier 2009 à Vienne.

Gert Jonke était à deux reprises invité au Festival de Loèche-les-Bains et ceux qui ont assisté à l’une de ses lectures, n’ont pas oublié son exceptionnel don de lecteur. Le mélange d’humour critique et le pouvoir poétique de sa langue étaient inimitables; son incomparable créativité et sa puissante invention langagière faisaient de lui l’une des voix les plus singulières de la littérature contemporaine.
Gert Jonke était un infatigable expérimentateur, déconstruisant le langage pour le recomposer en un nouvel agencement original. Depuis quelques années, il s’était consacré à l’écriture théâtrale. «A partir de deux, trois mots griffonnés, il faisait apparaître un univers entier. Comme un grand musicien de jazz qui, sur la base d’un petit thème, est capable d’improviser une partition complexe et raffinée. Et il était l’orateur génial de ses propres textes.» écrivait Elfriede Jelinek.

J’ai rencontré Gert pour la dernière fois à la fin du mois de novembre dernier, à Vienne. Il était encore optimiste quant à son état de santé et pensait pouvoir maîtriser la maladie. Quelques semaines avant son décès, il put encore jouir de nombreuses rencontres et rendez-vous. Il fut entre autre récompensé pour la troisième fois par le prix des auteurs «Nestroy», prix théâtral de la ville de Vienne.
Sa fin prématurée et surprenante est une perte douloureuse pour chacun de nous. Il est difficile d’admettre qu’un aussi formidable artiste, maître spirituel du langage disparaisse si tôt. Sa compagne, la réalisatrice Ingrid Ahrer, a réalisé ces dernières années un portrait de lui, humain et poétique, en collaboration avec Martin Polasek. Le film – «Voyage vers les profondeurs inexplorées de l’horizon – un portrait du poète Gert Jonke», a été diffusé sur ORF et 3Sat. Il a en outre reçu en 2008 le prix de la télévision autrichienne dans la catégorie documentaire. Ingrid Ahrer et Martin Polasek présenteront ce saisissant portrait filmique lors du Festival, pour nous permettre de garder le souvenir de tout un univers de romans, de poèmes, de scénarii, de pièces radiophoniques et de théâtre vivant dans notre esprit.
Hans Ruprecht

MARTIN POLASEK, est metteur en scène et réalisateur pour la télévision. Il est né en 1955 et vit actuellement à Vienne. Il compte à son actif d’innombrables mises en scène d’événements culturels, des adaptations de productions théâtrales pour la télévision, de nombreuses retransmissions de festivals et de concerts ainsi que l’élaboration de programmes culturels spéciaux: des documentaires, des feuilletons et de portraits d’artistes. II est privat-docent en conception vidéo et réalisation à la Haute Ecole des Arts de Zurich.

INGRID AHRER, née à Kärnten, vit à Vienne. Réalisatrice, dramaturge et metteure en scène, elle fut la compagne de Gert Jonke. Elle réalisa divers projets artistiques avec lui et autour de lui.

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15e Festival international de littérature de Loèche-les-Bains
2 au 4 juillet 2010